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mardi 31 octobre 2017

MARIANO FORTUNY UN ARTISTE HORS DU COMMUN



Les trésors de Venise

Il y  a Venise et Venise. La ville que l'on visite pour la première fois, avec les gondoliers, le grand canal, la place San Marco, la Fenice, le Rialto et puis il y a la ville dans la ville avec des palais et des maisons délabrées, les canaux secondaires et les vieux vaporetto bondés du matin au soir, et puis il y a les personnages qui ont marqué Venise  par leur activité,  leur créativité, leur art...Mariano Fortuny espagnol de naissance mais vénitien d'adoption, fut un de ceux qui ont laissé leur empreinte à Venise.
 "Luxe,calme et volupté" peut résumer l'atmosphère de son palais transformé en musée  au sein de la Sérénissime
un gondolier et sa  gondole
l'usine Fortuny 
 le grand canal

Un empire à lui tout seul, un érudit , un homme multiple  chercheur, scientifique, peintre, décorateur.


 Dans le domaine du textile il a réussi à innover en se souvenant du passé et en le réactualisant avec passion et savoir faire.
 Sa réussite son chef d'oeuvre suprême c'est la soie plissée utilisée pour la fameuse robe Delphos.

 Sa technique  il la fit breveté et depuis personne, personne non vraiment personne pas même un japonais pourtant célèbre pour ses plissés n'a encore réussi à faire aussi bien. Le miracle c'est la souplesse, la fluidité, la sensualité, le tomber de ces étoffes.
  Les tissus sans la couleur ne eraient pas présents dans un musée. Fortuny  fut  un coloriste merveilleux, il entra dans l'univers  du textile  avec une palette très personnelle : subtilité des tons, douceur des harmonies, originalité des motifs, gamme très personnelle de matières colorantes. Fortuny réinvente la couleur...
Dire que les créations de Fortuny sont sensuelles est une évidence "qui recherche le plaisir des sens" définition dans le Littré dictionnaire de la langue française. 
La vue est largement récompensée  par une offre époustouflante. Des rouges si profonds qu'ils vous ensorcèlent, des bleus divins, des roses fanés qui reprennent vie...
Mais l'œil ne suffit pas à appréhender les qualités exceptionnelles des velours. Cette matière  ne réclame que des caresses, elle  n'est que douceur,  et  pourtant le toucher c'est un sens interdit dans les musées!  
Mais dans ce palais  devenu musée/atelier, tout est fait pour se sentir comme un invité chez monsieur Fortuny, alors je me suis prise au jeu l'espace d'un rêve éveillé.   Ces étoffes transformées en  châles,  robes ou  peignoirs  toutes sagement immobiles semblèrent s'animer d'un seul coup à mon passage.  Curieuse impression, devant cette somptueuse robe de chambre,   posée  sur  les épaules d'un mannequin de bois. Elle aurait voulu  parler, raconter des histoires, son histoire. Qui fut son heureux propriétaire, comment est elle arrivée là,  pourquoi Fortuny utilisa cette  teinte et imprima ce dessin?   Que de questions sans réponses! Des suppositions alors :   c'est l'absence de bruit que je perçois  L'idée véhiculée par ce vêtement c'est précisément le silence. Le velours absorbe le bruit,  et la robe de chambre ou robe d'intérieur c'est le vêtement que l'on porte pour soi, chez soi, à l'abri du regard des autres,  les convenances le protège de la foule comme il protège le corps de son propriétaire, au XVIIeme siècle  la robe de chambre  souvent un élément fort couteux en soie, en velours ou en  toile de coton peintes faisait partie du vestiaire masculin.  Molière met ces paroles dans la bouche de monsieur Jourdain"Je me suis fait faire cette indienne-ci"
Pour certaines personnes  la robe de chambre est plus qu'un  élément vestimentaire,  c'est une amie . Diderot aimait sa vieille robe de chambre : "Pourquoi ne pas l'avoir gardée, elle était faite à moi, j'étais fait à elle..." in REGRETS sur ma vieille robe de chambre ou avis à ceux ont plus de gout que de fortune. 1772
                                  














Les  sensations olfactives étaient aussi présentent dans ce palais.   Les étoffes étaient encore imprégnées des effluves  exotiques des lourds parfums utilisés jadis. 
L'odeur des  tissus à quelque chose de particulier, difficile à décrire mais pour qui à le nez fin, cela peut être un bonheur ou un cauchemar. 

La visite se terminait et d'ailleurs le musée allait fermer, c'est cette annonce qui me fit revenir à la réalité. Mais étais je vraiment sortie de mon rêve? Je me trouvais dans un lieu imaginaire où j'étais autorisée à toucher  les foulards imprimés de "grenades", à caresser des vestes en velours de soie,  à soupeser la frêle silhouette d'une chemise plissée...Reve ou réalité? Et non réalité, car comme dans tous les musées, la sortie s'effectue en traversant la boutique "souvenirs"...  

Je connaissais le travail de cet artiste, mais ici dans ce qui fut son atelier j'ai découvert son univers et ce fut pour moi un moment  délicieux, quelques instants de rêve que je voulais partager avec vous. 


Fortuny fut un grand homme pour la mode et cet automne Paris expose Fortuny au musée Galliera. Une exposition à ne pas manquer

 
Bye Bye Venise, à bientôt!

lundi 30 octobre 2017

COMMANDE DE TISSUS IMPRIMES PAR SACHE POUR LA MAISON CALLOT


PAGE D'UN CARNET DE COMMANDES DE SACHE, TEXTILE DESIGNER; IL A TRAVAILLE  POUR DIFFERENTES MAISONS DE COUTURE ENTRE 1920 ET 1975
CI-DESSUS DES TISSUS COMMANDES PAR LA MAISON CALLOT,  MOTIFS CREES PAR SACHE
ENTRE 1925 ET 1930

mercredi 25 octobre 2017

UNE MODE VERSION " LES MISERABLES"

  A peine sortis des cartons en provenance de Chine, ils ont une mine affreuse ces articles. Le voyage a été long, ils sont restés pliés quelques jours ou plus, mais le personnel de ce magasin n'a pas le temps de ce préoccuper de ce détail, le défroisser serait une perte de temps, que le client le fasse chez lui. Mais  qui voudrait acheter ce genre de vêtement et surtout le porter? Est ce vraiment attirant?  Avez vous envie de vous glisser dans cette robe ou d'enfiler ce manteau?






















Ces  photos  n'ont  pas été prises dans une friperie, ni dans une foire à tout, les articles sont  généralement en meilleur état, ceux là n'y trouveraient pas leur place à ce prix là.
Ce sont deux grandes enseignes internationales qui présentent ainsi les articles fraichement arrivés dans les rayons
J'invite les responsables  de magasin à se rendre à l'évidence, des rayons comme ceux ci  ne sont pas tolérables. Remettez un peu d'ordre et ne prenez pas les clients pour des pigeons, ils sont capables de réfléchir, et de choisir. Le but n'étant pas de se fringuer mais de se vêtir, pourquoi s'enlaidir en portant de tels nippes, hardes, frusques. "Nippes se dit populairement au pluriel pour des vêtements  en mauvais état, vieux et usés" définition Le Littré 1880

LE NOIR OU LE GRIS? UNE MODE GRISE MINE

Ce matin je suis allée faire un petit  tour dans le quartier de l'Opéra à Paris où  grands magasins  et  les marques à succursales multiples font de leur mieux pour  présenter les articles de leur nouvelle collection. Cette visite m'a suffit pour me rendre l'évidence :  la mode  cet l'automne  est triste.   En automne la nature se pare d'une palette de couleurs riche en nuances. Rouges orangés, verts jaunes, bruns chauds...Pourquoi  dans les  rayons "mode"" passe t on directement du marine -blanc et rouge de l'été  au noir et au gris? La transition est brutale.




 Ce matin le soleil était au rendez vous, le ciel offrait un bleu presque limpide, oublié la grisaille d'hier la pollution, les allergies.. et pourtant  dans les magasins j'ai broyé du noir, noir vert, noir bleu, noir noir, noir mat, noir brillant, noir pelucheux, noir lisse, noir version satin, noir sur-teint, velours noir. N'est pas noir chic, noir élégant qui veut.
 j'ai déambulé dans des rayons pleins à craquer de vêtements gris clair, gris moyen, gris très foncé, mais gris... Ne dit on pas faire grise mine?  Le gris couleur passe-muraille, couleur neutre mais rien d'indolore pour le porte feuille... Pour me remonter le moral j'aperçois au fond sur un portant, un  petit point blanc, mais il est bien seul!...   Moi je veux colorer mon vestiaire!








LE GHALAMKAR : GRAVURE . IMPRESSION. (suite et fin)

LES INTERVENANTS
Les opérations  suivent  un ordre inexorable. Le travail est partagé entre trois ou quatre artisans suivant que le tissage du coton ait lieu sur place ou qu'il soit un produit importé. Les artisans sont secondés par des ouvriers qui accomplissent des taches moins nobles telles que la découpe du tissu, le lavage, le rinçage, le repassage..
Dans l'ordre d'apparition nous trouvons



-LE TISSERAND celui qui tisse essentiellement du coton. Il fournit des toiles  écrues, simples comme le calicot ou plus élaborée comme la percale. L'étape du tissage peut être supprimée si les tissus sont importés
Les toiles de coton ont un fond  clair  mais jamais blanc, il est généralement écru voir jaunâtre lorsque le tissu est plongé dans une décoction de pelures de grenades  mais il est toujours décati avant d'être livré aux mains de l'imprimeur.




Percale cotonnade plus blanche et tissage serré, ou calicot plus jaune et au tissage plus lâche. Bien que la plupart des teintures soient réalisées avec des colorants chimiques, je n'ai pas vu de support textile autre que du coton.
La  percale  ou le calicot sont  aujourd'hui importés d'Inde ou de Chine, et livrés en pièce de 50 mètres , la première étape consiste à  découper le tissu en morceaux de différentes longueurs selon la destination   (nappes, rideaux, sacs ou serviettes). Les coupes sont mises à bouillir  dans de grandes bassines pour les décatir

Le tissu est ensuite essoré d'une manière très particulière : plié en quatre les coupes sont balancées ou plutôt lancées    à  plusieurs reprises contre une grosse pierre posée sur le sol, pour évacuer l'eau en surplus. C'est un travail de force mais très efficace. Est ce une mise en scène ou bien cette façon de faire est elle  systématique? Je n'ai pas eu de réponse satisfaisante, alors je me console en imaginant que la tradition à la vie plus dure qu'on ne l'imagine.



La suite est plus simple : les coupes étaient étalées sur le sol pour sécher naturellement au soleil. Aujourd'hui je suppose que les machines à laver et à sécher sont largement utilisées. 
le pont aux 33 arches  Allahverdi khan qui enjambe  le fleuve Zayandeh rud  qui traverse Isfahan coupant la ville en deux.
jadis les ghalamkar étaient lavés et rincés dans l'eau du fleuve.

- LE SCULPTEUR intervient pour graver les blocs de bois, en général en Iran on utilise le bois du poirier . Il reproduit les dessins sur des morceaux de bois appelé bloc ou timbre, puis il creuse en suivant le trait,  afin d'obtenir le motif en relief.  Il semble que la machine n'ait pas encore remplacée la main de l'homme.
Le bothé ou palmette est un motif traditionnel très souvent repris par les sculpteurs; en persan il signifie bouquet de fleurs; c'est aussi ce même motif que l'on retrouve en Indes et sur les châles du kashmir, en Occident on parle de motif cachemire.




-LE TEINTURIER prépare les matières colorantes. Aujourd'hui son travail est simplifié, puisque la plupart des ateliers utilisent des colorants chimiques


-L'IMPRIMEUR arrive en bout  de chaîne. La totalité du tissu est couvert de dessins dont seuls le contour a été imprimé en noir. Il faut ensuite les remplir de couleur. Un passage par couleur est nécessaire et entre chaque passage il faut compter un temps pour le  séchage. Il y a généralement trois ou quatre couleurs Selon la dimension de l'article à imprimer, l'imprimeur peut frapper entre 500 et 4000 fois sur un timbre. C'est la raison pour laquelle le tranchant de sa  main est équipé d'une protection  de cuir maintenue par un bandage en coton.




















Il pose son bloc préalablement imbibé de matière colorante sur le tissu et à l'aide du tranchant de sa main  il assène un coup sec sur le bois afin que le dessin et la couleur soit en contact sur toute sa surface avec le tissu. Pour amortir le choc le tissu est posé sur une superposition de couvertures de feutre. L'opération se poursuit  jusqu'à ce que tous les dessins soit colorés.

LES PETITES MAINS
Je n'oublie pas ces gens,  ceux qui travaillent dans l'ombre, ici on dirait plutôt au soleil, 
Ils sont les premiers et les derniers maillons de la chaîne. Ils commencent par  décatir les tissus, puis lvont  mettre le point final au travail en lavant et en rinçant le tissu imprimé afin de fixer les couleurs. 
J'oubliais dans cette liste la main d'œuvre féminine.  Les ghalamkar sont reconnaissables non seulement aux motifs imprimés mais également aux franges nouées qui terminent  deux ou quatre cotés  des coupes, Travail fastidieux, répétitif  dévolu aux femmes  






  FINITION : LA GRANDE LESSIVE
.
Autrefois toutes ces opérations de lavage se passaient sur les rives du fleuve Zayandeh rud
 aujourd'hui il est malheureusement à sec 11 mois par an, il faut donc sortir de la ville pour laver et rincer les ghalamkar. Des grands ateliers se sont installés dans la banlieue afin de traiter dans des machines à laver  quasi industrielles  toute la production locale.
Les colorants chimiques utilisés  aujourd'hui pour imprimer les cotonnades sont néfastes pour l'environnement et si le fleuve retrouve un jour son niveau d'eau  d'antan,  jamais plus on ne verrait les artisans laver et rincer les tissus dans la rivière car la pollution des eaux serait inévitable.

Après être passé entre  les mains des artisans les coupes imprimées   vont subir une série de lavages/ rinçages afin de fixer la couleur.


Elles sont plongées pendant plusieurs heures dans de grandes cuves d'eau chaude, où elles sont remuées à l'aide de grands batons




elles sont  ensuite emmenées au bord d'une rivière  où elles sont jetées dans un bassin et laissées dans l'eau courante  pour être rincées .
 t

rinçage en eau courante

essorage


sechage

La dernière opération  avant la mise en vente consiste à laisser sécher les tissus au soleil sur les rives de la rivière  pendant  quelques jours en été afin d'adoucir les couleur, puis en hiver ils sont à nouveau exposés au rayon du soleil pendant plusieurs semaines, ainsi les couleurs seront solides
Je ne sais pas combien de temps encore ces opérations seront réalisées dans le respect des traditions. Pour les plus belles pièces elles perdurent mais  pour le tout venant, les  machines remplacent les hommes au moins pour les opérations de lavage et de séchage. Le cout de la main d'œuvre moins qualifiée devenant un handicap pour la commercialisation.


Un petit retour historique
Si aujourd'hui on redécouvre cet artisanat, au XVIIeme siècle  les indiennes et les persiennes importées en France par les compagnies des Indes connurent un vif succès ce qui  engendra des protestations de la part des artisans et fabricants français qui jugèrent  cette concurrence déloyale, leur commercialisation fut alors interdites par la loi. Mais cette interdiction fut détournée par de nombreux "indienneurs" qui installèrent leur manufactures dans des régions ou des pays dans lesquels cette loi n'était pas appliquée . L'Alsace et la Suisse surent tirer profit de cette interdiction offrant asile aux expatriés économiques. Au XVIIIeme siècle, cette loi fut abrogée.  C'est un allemand nommé Oberkampf qui installa en France à Jouy en Josas une manufacture d'impression sur tissus. Il connut un beau succès commercial avec ses toiles de Jouy.



A SUIVRE

mardi 24 octobre 2017

LE GHALAMKAR : COTON IMPRIME AU BLOC DE BOIS SCULPTE


LA FABRICATION DU GHALAMKAR AU XXIeme SIECLE (SUITE)

Dans la région d'Isfahan la  fabrication des tissus imprimés au bloc n'a jamais cessée depuis le XVIeme siècle. Manteaux, vestes,  nappes,  tapis de selle, couvertures de chevaux,  sacs,  rideaux, dessus de lit... Les cotons imprimés sont en 2017 des articles utilisés par les iraniens au quotidien. Nous sommes allés dans un restaurant installé  dans un ancien hammam, situé dans le quartier iranien d'Isfahan Jolfa et les tables étaient garnies de nappes de imprimées au bloc.






















QUAND LE BLOC DE BOIS SCULPTE REMPLACE LE KALAM

Au XVI eme siècle les toiles peintes ou persiennes  furent victimes de leur succès. Le temps ne comptait pas,  la lenteur  d'exécution était un présage de qualité, jusqu'au moment où il devint un obstacle à la commercialisation des articles. Trop de commandes et   un travail qui nécessitait  beaucoup trop de temps Il fallut trouver un moyen de  produire plus rapidement  et plus économiquement. Graver les dessins en reliefs sur  des blocs de bois  qui une fois enduits d'une matière colorante seraient appliqués sur la toile de coton, fut la solution

ma collection est plus réduite.  
magnifique collection de blocs dans l'atelier d'impression que j'ai visité dans le bazar d'Isfahan

DE LA PIECE UNIQUE A LA SERIE, DE L'ART A L'ARTISANAT
Le travail était plus rapide et économiquement  plus rentable..C'est une équipe composée d'au moins trois intervenants essentiels  (graveur, teinturier, imprimeur)  qui  œuvrait dans les ateliers, chacun ayant un role bien déterminé dans cette chaîne.
Ce travail répétifif répond cependant aux critères de l'artisanat. La main de l'homme grave le bois et  une autre main  va  préparer les colorants cependant que le dernier manipule  le "bloc de bois sur la surface textile", la différence entre tissu peint et tissu imprimé est cependant perceptible. Le ghalamkar  moderne est  un  multiple et non un original, j'ose la comparaison entre une peinture et une lithographie.
Le commerce suit des règles immuables hier comme aujourd'hui les imprimeurs proposent des qualités  et des tarifs différents. 
Une nappe, selon ses dimensions  peut être tamponnée entre 600 et 4 000 fois,  le support peut être une percale ou un simple calicot.  La  finesse de la gravure sur bois, la complexité du dessin sont des indices de qualité.  Chaque article sortant des ateliers est "tamponné" sur l'envers  c'est la marque de fabrique de l'entreprise qui est imprimée, sa carte de visite indélébile, avec un bloc de bois  bien sûr.


tampon réalisé sur l'envers d'une nappe en Octobre 2017

tampon réalisé sur une nappe achetée en 1970 dans une brocante en Floride!

















LES COULEURS
Aujourd'hui même si sur une étagère de l'atelier  trônent des bocaux  qui contiennent des matières
colorantes naturelles, les artisans utilisent des produits chimiques, autrement comment pourraient ils vendre leur production à des prix si bas? Le safran pour le jaune?

Personne n'est dupe, le prix du gramme dépasse celui du caviar, voir de l'or.....le lapis lazuli pour le bleu? pas plus crédible...


Dans un coin de l'atelier des bocaux contiennent des pigments  naturels   jadis   utilisés pour imprimer les Ghalamkar mais ils n'ont pas été ouverts depuis longtemps, c'est le coin musée qui donne un air de d'authenticité à l'ensemble des articles exposés dans l'atelier /boutique  Le commis connait par cœur le nom des plantes qui entrent dans leur composition et il les présente avec une sorte de fierté en français et en anglais à chaque fois qu'un touriste visite l'atelier. Mais l'impression est aujourd'hui réalisé avec des colorants chimiques la plupart du temps,   quelques exceptions demeurent bien sûr, le prix est alors à la hauteur de la rareté des produits. Ceci n'enlève rien à la qualité du travail des artisans qui suivent à la lettre les différentes étapes de fabrication d'un ghalamkar.


A SUIVRE


samedi 21 octobre 2017

CABAN, CABIG, KABIC : UN DEUX OU TROIS?

 UN VÊTEMENT EN TROIS MOTS


Ce mot cabic est d'origine bretonne, cab  désigne une cape, alors que le mot caban est d'origine arabe,  gaba, caba ou qaba  désignant une grande veste , un vêtement de protection, on pourrait dire un manteau, à manches longues, porté par les bedouins

Le terme kabig désigne à la fois une veste sportswear, longue croisée haut sur la poitrine, mais aussi le tissu dans lequel elle est taillée. Le drap caban ou kabig est le terme utilisé pour désigner un gros drap de laine, (cardée, foulée, serrée).

SUR TERRE ET SUR  MER
Longtemps ce tissu de laine épais, presque raide, imperméable et chaud fut destiné aux vêtements des marins. Mais même à terre, les anciens marins gardèrent l'habitude de porter le caban .
En effet, si les goemonniers ramasseurs d'algues sur les côtes bretonnes, surtout dans le Finistère portaient le caban c'est sans doute parce qu'ils étaient d'anciens marins.  Le caban leur était tout aussi utile à terre.
Aujourd'hui le caban se porte en ville, à la campagne et parfois encore sur les cotes du littoral.

PAS DE  HASARD MAIS DE LA NÉCESSITÉ
 Qu'il s'agisse du caban ou du duffle cota on retrouve le double boutonnage. Il ne s'agit pas d'une décoration anecdotique. Ces vêtements  étaient destinés à protéger les marins du vent et de la pluie. Le coté fonctionnel est mis en avant dans les détails.Un double boutonnage permettait de  fermer le caban du coté opposé à celui d'où venaient le grain
Un grand col peut se relever et se fermer par deux boutons au niveau du cou mettant le cou et la nuque à l'abri du vent et de la pluie
Deux poches extérieures inclinées permettent de garder les mains au chaud plus commodément.
Les deux poches intérieures sont destinées à conserver des articles plus précieux
 Les boutons sont plats et assez gros pour pouvoir les manipuler avec des gants sans problèmes et surtout pour ne pas s'accrocher aux cordages
Il est court, et s'évase légèrement afin de ne pas gêner les manoeuvres
La longueur des manches inhabituelle permettait de garder les poignets et les mains au chaud

UNE ORIGINE ORIENTALE
Si le caban fait partie de la tenue réglementaire dans la marine Nationale depuis 1853, il est apparu dans sa forme primitive au 17e siècle à Venise, dans une cargaison venue d'Orient. On mentionne un vêtement en laine avec des manches et un capuchon. On peut imaginer un article proche au niveau de la forme d'un burnous, d'une gandoura ou d'une djellaba.
Venise était le lieu où  toutes les marchandises se rencontraient, celles qui venaient d'Occident et celles qui venaient d'Orient. Les cahiers de tendances n'existaient peut être pas encore, mais la mode n'a cessé d'emprunter ici pour ajouter là. La mixité est toujours un élément qui fait avancer le monde et  bouger la mode

UN VETEMENT OFFICIEL
Le terme caban est cité dans l'ouvrage de monsieur Pingeon en 1786 " Manuel des gens de la mer":
 employé en marine à propos d'une capote courte de marin, à manches et à capuchon recouverte d'une toile goudronnée
Une ordonnance de cette même année précise avec  plus de détails  la tenue vestimentaire à bord des vaisseaux:"dans les campagnes du nord, sa majesté fera embarquer une certaine quantité de capotes nommées cabans, des bottes et des gants de lain. Un des dits caban servira pour deux matelots, étant particulièrement destinés pour ceux qui sont de quart."

HIER ET AUJOURD'HUI
Une veste trois quart, marine, en laine raide et imperméable, croisée avec des boutons dorés, argentés, marine, décorés d'une ancre, ou tout simples , appartient toujours au vocabulaire des gens de la mer. Porter un caban sur terre  pour un civil en promenade, c'est un peu porter la caquette de capitaine lorsque l'on rêve de naviguer sur un yacht.  Dans les années 1970  le caban est devenu comme le jean, le duffle coat ou  le trench,  un article consacré par le cinéma qui lui donne droit de cité dans les villes.

IMPERMÉABLE OU IMPERMÉABILISÉ?
 Imperméable tout court. A quoi la laine doit elle cette qualité ? Pour obtenir un drap de laine le foulage est très poussé, et le tissage très serré. Autrefois ces articles étaient coupés dans des lainages non dégraissés. La suint constituait une  imperméabilisation naturelle. C'est pour ces raisons que   le drap caban est une étoffe lourde et plutot raide. Les couleurs  les plus courantes sont  sombres : marine, noir ou gris. Mais un drap caban écru, jaune ou rouge n'est pas chose introuvable.
Au XVIIe siècle, les marins fabriquaient eux même leur caban. Pour imperméabiliser la laine, ils l'enduisaient d'un mélange de suif, de goudron et d'essence de térébenthine.

COSTUME OU DEGUISEMENT?
 Aujourd'hui sur les côtes bretonnes ou normandes, les touristes jouent le jeu. Caban marine, pull marin rayé made in France, bonnet en laine et le tour est joué, mais pas toujours gagnant.  Trop c'est trop, et on peut friser le ridicule en se parant " breton" de la tête aux pieds. Ne passe pas pour un autochtone qui veut.

L'AUTHENTIQUE EST DEVENU UN LUXE
A l'adresse des non initiés, les cabans sont rarement coupés dans un vrai kabig de qualité.  Il ne s'agit pas d'un article sophistiqué. Son coté rustique l'emporte dans la version utilitaire. On trouve des cabans  taillés dans un beau cachemire mais de nom il n'a que la forme, le fond finalement n'a plus d'importance  Il ne suffit pas d'écrire caban sur l'étiquette pour que vous endossier un véritable cabig.
Ne vous fiez pas uniquement au détail de l'ancre sur le bouton, soyez attentif à la qualité du tissu. Le pur laine est à privilégier si vous voulez un article qui se patine avec le temps, sans pour autant mal vieillir.
L'acquisition d'un cabig n'est pas un achat banal, ce n'est pas un article de consommation /jetable, non c'est un bel objet.  Ce que j'aime dans ce type de tissu, c'est que l'on peut faire un bout de chemin ensemble, chacun prendra quelques rides, et puis après... On se fait l'un à l'autre comme de bons et vieux amis. Et si vous recherchez cet accord vêtement/corps vous êtes fait pour vous entendre avec votre caban en cabig.







BAYADERE : UNE ETYMOLOGIE QUI INVITE AU VOYAGE

L'étymologie de bayadère  réserve quelques surprises. Curieusement je remarque qu'un petit mot sans trop d'importance, trop souvent utilisé à tord  peut nous entraîner  dans des univers aussi différents que la culture, la religion, la technique et la politique

N'EST PAS BAYADERE QUI VEUX
Le terme bayadère a aujourd'hui perdu de son prestige,  il est devenu un nom générique au point de désigner des tissus comportant de larges rayures multicolores, oh , hérésie!

Dans l'annonce ci dessous le terme bayadère est usurpé. Il s'agit d'une simple étoffe rayée.

Toiles au Mètre | Tissus Rayés Multicolores Catalan

eshop.toiles-du-soleil.com/fr/toiles-au-metre

Les toiles du soleil sont des toiles bayadères, c'est à dire que le tissu présente des rayures multicolores, dans la tradition du tissage basque et catalan.

Pour les puristes il n'est de véritable tissu bayadère  que celui qui présente une succession de bandes de largeurs variables, de couleurs et de matières diverses, produites par des armures différentes.
Le  décor  en bandes  horizontales (perpendiculaires aux lisières) des tissus bayadère est obtenu par tissage.  C'est l'alternance de ces bandes aux couleurs vives et contrastées et de largeurs différentes qui donne son caractère à ce tissu, qui autrement serait simplement un tissu  barré, biffé ou rayé

















RAYURES ET BANDES
On dit d'un tissu qu'il est rayé lorsque la chaine est divisée en différentes nuances qui forment les rayures. Ces traits plus ou moins épais sont verticaux, parallèles aux lisières
Il existe des étoffes rayées plus complexes comme l'imberline ou le pékiné  mais c'est une autre histoire.



les tissus barrés . On dit d'un tissu qu'il est biffé ou  à bandes lorsque la trame est divisée en différentes couleurs qui forment des bandes horizontales (perpendiculaire aux lisières)

















BAYADERE : UNE ETYMOLOGIE SURPRENANTE

On a l'habitude de croire que le mot bayadère est d'origine portugaise de balhar danser et bailadéira ou bailadera danseuse sacrée de l'Inde en portugais. Mais ce n'est pas aussi simple parce que le mot baller en vieux français exprime l'idée de bouger, se remuer, se balancer or baller vient du bas latin ballarer = danser qui donnera le mot bal=réunion dansante, et si l'on pousse le raisonnement plus loin ballein se rattache à une racine indo- européenne que l'on trouve dans le sanskrit donc le mot bayadère a des correspondances  dans de nombreuses langues européennes.


QUEL RAPPORT ENTRE LES DANSEUSES SACREES INDIENNES ET LE TISSU BAYADERE
Rappelons nous que l'économie européene prospéra  grace à une politique de colonisation. Les portugais, les hollandais et les français (Pondichery, Chandernagor, Mahé...) établirent dès  XVIIeme siècle des comptoirs en Indes, des ports qui facilitaient les échanges commerciaux entre l'Orient et l'Occident
Voici donc une explication qui tient la route : les portugais étaient présents dans la région de Surate, ville où se trouvaient en grand nombre  des Devadâsi ou servantes de Dieu, dit en terme moins flateurs  c'étaient des "esclaves de Dieu"   courtisanes et  danseuses, balhaderia en portugais.. La suite ? Le mot subit une légère transformation en donnant bayadère.

Il y avait deux catégories de servantes dans les temples hindous. Les devadâsi qui demeuraient dans l'enceinte des temples
et celles qui parcouraient le pays en dansant et chantant lors des processions


Or en 1838  il y eut une tournée  en Europe et 28 représentations à Paris des Devadâsi. C'est ainsi qu'elles purent  faire connaître leur art. Les costumes jouait un rôle très important, dévoilant une part du mystère de l'Orient
Les robes étaient agrémentées de ceintures de couleurs vives, leurs bras couverts de bracelets, leur cou paré de colliers. Tous ces accessoires formaient des bandes multicolores dont l'effet visuel était  exacerbé par les couleurs vives
 Ainsi le tissu bayadère par ses bandes  colorées est un rappel du costume des danseuses sacrées indiennes appélées  désormais les "danseuses bayadères"

mercredi 18 octobre 2017

LE GHALAMKAR : TOILES PEINTES.

Le mot seul suffit à susciter ma curiosité. En arrivant à Isfahan, j'ai eu un aperçu de ce magnifique artisanat, dans les vitrines des boutiques bordant la place Naghsh e Jahan les nappes et autres set de table  s'exposaient aux regards des visiteurs.
la place Naghsh e Jahan  rebaptisée  place de l'Imam;  les arcades abritent aujourd'hui des boutiques dédiées exclusivement  à l'artisanat iranien ( en principe, mais ce n'est pas toujours le cas)
Qu'est ce que le Ghalamkar? Il s'agit d'un part "pictural" traditionnel  iranien, un artisanat que l'on r trouve en Inde sous le nom de  kalamkari. Difficile de savoir qui de la Perse ou de l'Inde influença l'autre ;   Vasco de Gama en 1499 nota  que des toiles peintes à la main partaient vers la Perse depuis Calicut. D'importants liens commerciaux liaient alors les deux pays; on note que les deux mots ont une origine commune issue de la langue perse  kalam que l'on traduit  par fait "à la main avec une plume, et de l'encre" parfois le mot ghalam ou kalam est traduit par stylo mais je préfères stylet.
On peut supposer qu'il s'agissait d'un roseau taillé en pointe rempli d'encre. Sa manipulation était délicate et de nombreuses années d'apprentissage étaient nécessaires pour acquerir la maitrise de cet instrument.
Au XVIeme siècle, ce fut l'apogée des toiles  peintes  à la main et  le terme ghalamkar  était alors  justifié Les artistes traçaient le contour des motifs en noir  à l'aide d'un  kalam  sorte de crayon en roseau   taillé en pointe ;  l'étape suivante consistait à remplir  l'intérieur des dessins avec un pinceau. 
Cependant entre chaque étape les tissus étaient lavés et séchés.  Ce travail réclamait non seulement un savoir faire, de la patience mais beaucoup de temps et ce fut l'obstacle qui mit fin à cette fabrication. Le temps!
Face au  succès  la production ne pu suivre et les artistes ne furent plus en mesure d' honorer les commandes, il fallut trouver  un moyen d'imprimer les tissus plus rapidement et donc  plus économiquement . Et c'est ainsi que naquit l'impression au bloc. Depuis lors,
les ghalamkar ne sont plus des tissus  peints mais imprimés. A SUIVRE


L'ART DU GHALAMKAR EN IRAN : COTONNADES PEINTES

LE GHALAMKAR  UN ARTISANAT PERSE



 DECRYPTAGE
 La traduction du mot dévoile le secret que se cache cette technique: dessin  peint  à la  plume. C'est sous la domination des Safavides, au XVIeme siècle que le ghalamkar  atteint son plus haut niveau de qualité. Artistes et artisans développèrent cet artisanat dans la ville d' Isfahan ( parfois Esfahan, parfois Ispahan). Aujourd'hui encore les cotonnades imprimées s'exposent dans les boutiques qui bordent  la place Naghsh -e-Jahan et dans les échoppes du grand bazar.

miniature représentant "l'élément architectural "central de la ville d'Isfahan  : une place  construite au XVIIeme siècle
sous le règne de  Shah Abbas Ier. Elle eut différents noms selon les époques
Naghsh e Jahan = portrait du monde
Meidan-e-Shah = place du roi
Meidan-e-Shah  place de l'Imam

A L'ORIGINE
Le ghalamkar était une toile  peinte à la main   Si les traductions du mot  ghalamkar  sont multiples : peint à la plume, plume et encre, dessin à la plume le sens est toujours le même.  Qu'il s'agisse de pinceaux, d'un kalam( roseau taillé en pointe)  ou d'un bloc de bois sculptés utilisé aujourd'hui, c'est la main de l'homme qui guide l'outil. 
Avant l'utilisation des blocs de bois sculptés ou gravés, il était fait mention de toiles peintes  et non de tissus imprimés. 



kalam : roseau effilé


INDIEN OU IRANIEN?
Cet artisanat a t il vu le jour en Inde ou en Iran, qui influença l'autre, bien difficile de répondre à la question, la circulation des artisans partageant leur savoir -faire et les relations commerciales entre les deux pays furent propices aux échanges culturels.  Les frontières sont   fort arbitraires,  invasions après invasions,  conquêtes après conquêtes, coup d'état après coup d'état, l'histoire  fait bouger les lignes frontalières, mais les populations elles demeurent fidèles à leur culture  sinon à leur religion, et si à un moment de l'histoire le territoire Perse arriva jusqu'en Inde sous Darius 1er au VIe me siècle avant JC pourquoi ne pas imaginer que l'art de peindre sur tissu naquit sur le territoire   Perse  ?


DU GHALAMKAR A LA TOILE DE JOUY
Dès la fin du XVII eme siècle  ces étoffes importées d'Iran et d'Inde  appelées persiennes et indiennes eurent un succès incontestable en Europe. Les tisserands français jugeant la concurrence trop forte, firent interdire leur importation. En conséquences pour répondre à la demande des clients frustrés par cet interdit les étoffes imprimées furent copiées par les européens, et  comme leur commerce était interdits de  nombreux "indienneurs"  tisserands et teinturiers installèrent leur manufactures dans des zones franches comme l'Alsace, et dans des pays accueillants comme la Suisse.  En 1760,  Oberkampf  allemand naturalisé français lui  installera  sa manufacture  de toile imprimées à Jouy en Josas.  
LES DIFFERENTES ETAPES DE LA FABRICATION D'UN TISSU PEINT EN PERSE
Le peintre disposait d'un matériel restreint :  des roseaux ou kalam   mot d'origine perse,  qui signifie travail à la plume qui donna en grec kalamos=roseau. C'est un outil t utilisé en Iran pour le ghalamkar et en  Inde pour fabriquer des kalamkari. Les formes sont variées : certains sont  taillés en biseaux, d'autres avec une pointe écrasée s'utilisaient comme un pinceau. Le kalam  suivant la manière dont il était taillé permettait de tracer des traits  avec des nuances et des dégradés

Premieèe étape 
Le tissu : une percale mot dérivé du persan percala = toile fine serrée. Deux qualités étaient utilisées la percale pour les plus belles réalisations et le calicot, toile de coton moins serrée et moins blanche pour les articles plus ordinaires.  Il semble que  les toiles servant de support pour les ghalamkar étaient probablement des produits d'importation  en provenance des Indes. La valeur ajoutée étant le décor peint et non le support.
La toile  étalée à même le sol  le maître ou ces élèves  délimitent le contour des motifs  avec un charbon de bois ou au fusain  puis à l'aide d'un kalam muni d'un tampon de laine imbibé d'encre noire, (qui sert de réservoir) le peintre   cerne   les contours des dessins  avec un trait noir, en repassant sur les traits provisoires réalisés avec du charbon de bois
La couleur noire était obtenue autrefois en laissant macérer plusieurs semaines des pièces de fer rouillée dans un bain d'eau sucrée, ou additionnée de lait.   

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Les motifs
La peinture  sur tissu contrairement à la teinture reste en surface, ne pénètre pas à l'intérieur des fibres c'est pourquoi elle est fragile et   très peu de Ghalamkar anciens sont encore en circulation. Seuls les ghalamkar utilisés  pour 'illustrer des récits, ou destinés à la décoration d'intérieur sont encore visibles dans les musées éparpillés à travers le monde.
Avec l'invasion arabe au VII eme siècle  les thématiques changent. Les motifs les plus communément représentés  sont inspirés par la flore et la faune,  des palmettes ou bothe ce que nous appelons motif cachemire, des arabesques  
La seconde étape consistait à remplir l'intérieur des dessins à l'aide d'un  kalam dont la pointe a été  écrasée pour la ramollir lui donnant l'aspect d'un pinceau. Les pigments utilisées étaient   d'origine végétale, animale ou minérale  fabriqués à base de graines, de racines, de feuilles,  d'écorces(safran, peau de grenade, brou de noix, (cochenille) Les pigments ne sont qu'un des éléments des matières colorantes, il faut ajouter d'autres substances (graisses ou des huiles)  pour obtenir des couleurs solides et facilement applicables. Le fond clair était toujours visible.
    

 La réalisation des Ghalamkar nécessitait un grand nombre d'heures, et un savoir faire acquis au cours d'un long apprentissage transmis dans les ateliers. Chaque Ghalamkar était différent à quelques détails près,  et bien que chaque artiste ait eu son style, le choix des  motifs et des couleurs était restreint et les innovations n'étaient  pas chose courante. Le but de l'artiste/ artisan était de montrer à quel point il maitrisait la technique et non  de faire preuve d'originalité. 

On peut observer que l'éventail des sujets et leur traitement changeaient en même temps que de nouveaux artistes arrivaient dans les ateliers, c'est ainsi que l'art s'enrichit, par le partage des connaissances et des techniques

Les  conteurs très nombreux en Perse,  utilisaient  les tissus peint pour illustrer leurs histoires  ;  notamment le  grand livre des rois, Shahnama, un  poème épique  écrit par Firdousi vraisemblablement entre le X et le XI eme siècle.  En Inde les kalamkari illustrent souvent   des épisodes du Ramayana ou le Mahabharata. 
Dans la région d'Andhra Pradesh en Inde, la surface des  tissus peints étaient lustrée, conférant une brillance et surtout accentuant la solidité de l'ensemble. C'est ce que les européens appellent chintz, un mot hindi qui signifie "peint"

  épisode de Livre des Rois sur un tissu peint


ARTISTE OU ARTISAN? 
Selon la définition  d'Aristote  au sens grec de téckné, l'art est une  habileté acquise par apprentissage qui repose sur des connaissances empiriques. Jusqu'au XVIIeme siècle, l'artiste n'était pas différencié de l'artisan.
 Aujourd'hui l'artisan est un producteur manuel d'artefacts utilitaires qui fabrique lui-même intégralement la chose, cependant que l'artiste met à profit ses connaissances intellectuelles et  esthétiques  pour créer une œuvre dont la finalité n'est pas d'être utile
L'artiste crée l'artisan reproduit. L'artiste est dans l'abstraction, l'imagination,  l'artisan lui est dans le concret, le quotidien, il  fabrique des choses utiles sinon fonctionnelles avec un minimum d'outils et en petites quantités

UN ART A SON SOMMET
Au XVIe  l'Iran sous la domination des safavides  le ghalamkar  atteint son apogée, sa réputation dépassa largement les frontières de l'Iran. Mais rapidement la demande dépassa les  limites  de production.  Trop long, trop cher, sous cette forme cet artisanat  fut victime de son succès et mourut pour renaître avec plus de vitalité. Cette renaissance lui fut bénéfique  puisqu'aujourd'hui les tissus imprimés sont encore spécificité du commerce  d'Isfahan
Une solution fut adoptée pour remédier à cet embarras : l'impression sur tissu au bloc de bois gravé. Plus rapide, plus économique, cette technique perdure jusqu'à aujourd'hui.


 A SUIVRE