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samedi 26 janvier 2019

WORKSHOP : LE JEUX DES CINQ SENS, UNE AVENTURE SENSORIELLE

TEXTILE/GASTRONOMIE : LES SENS EN EVEIL
C’est  un exercice très subjectif, une expérience que chaque participant pourra répéter à l’envie en faisant appel à ses souvenirs olfactifs, en prêtant une oreille plus attentive à son environnement textile, ou en observant avec ou sans compte fils une étoffe. 
L’ouïe, le toucher, l’odorat, le goût, la vue sont des outils précieux que nous négligeons trop.  J’aime toucher un tissu parce que mes doigts me renvoient un signal qui me renseigne sur l’aspect de l’étoffe, c’est un complément essentiel à la vue. Léger ou lourd, souple ou raide, brillant ou mat, tous ces détails sont transmis par les mains et les yeux mais il est possible de pousser plus loin la découverte en aiguisant tous les  sens; avez vous déjà entendu  le cri aigu d'une soie que l'on déchire,  avez vous remarqué le toucher urticant de la ramie,  et le gout sucré d'un morceau de lin, un article en laine  n'a t il pas une odeur particulière lorsqu'il est mouillé? Si vous voulez découvrir ce qui se cache dans un morceau de tissu, faites appel à  vos sens.
  

UN VOCABULAIRE COMMUN
Je ne sais pas s’il est de bon ton de « mettre son nez dans son assiette » mais c’est ce que je fais lorsque je suis à table, mon odorat est une aide précieuse pour « comprendre » la nourriture présentée, tout autant que mon œil ou mes papilles, l’arôme, les effluves, le fumet, tout cela fait partie de l’aventure gustative. Alors oui j'ai mis à profit ma curiosité naturelle pour aller à la découverte des étoffes d'une manière peu orthodoxe mais oh combien amusante. Si vous  aimez emprunter  les chemins de traverse, alors suivez mois dans cette jolie aventure textile.

Dans le vocabulaire courant, il est d'usage d'utiliser des qualificatifs sensoriels similaires pour parler tissus et gastronomie : la légèreté d'une mousseline, apprêter une toile,  blanchir un lin, l'aspect glacé d'un chintz,  le lustre d'un taffetas, le grain d'un crêpe de laine, l'onctuosité d'un satin, la fraîcheur de la ramie. Tous ces mots s’adressent à l'un ou l'autre de nos sens et sans eux la vie serait insipide.


SOUVENIRS SENSUELS
Plus qu'une photo, un article textile voltige parfois dans le tiroir à souvenirs de notre mémoire. 
Qui ne se souvient pas d’un vêtement adoré ou vraiment détesté ? Qui n'a pas une histoire à propos d'un article de sa garde robe ? 
Qui n'a jamais eu du mal à se séparer d'un vêtement même usé jusqu'à la trame ?
Le vêtement n'est pas un article futile, en tout cas pas toujours.  
Parfois audacieux en découvrant tout ou partie du corps, souvent complice lorsqu'il magnifie la silhouette, il peut devenir une contrainte lorsqu’il est trop lourd, mais jamais le tissu dont on fabrique les vêtements ne devrait être  oublié. Puisque la fibre textile nous accompagne du lange au linceul, rendons lui justice en apprenant à la connaître autrement qu'à travers l'étiquette cousue sur les vêtements. Pour cela, devenez le héros de ce jeu et mettez vos  cinq sens  à contribution.

Les qualités intrinsèques des tissus et de la nourriture peuvent être améliorées
En cuisine, les épices sont des exhausteurs de goût ; dans le domaine des textiles, les apprêts améliorent ou modifient  les qualités techniques d’une étoffe.
Aujourd’hui, le bio se développe au niveau des produits alimentaires et des fibres textiles.

Un buffet textile
En goûtant, en brûlant, en humidifiant les échantillons de différentes matières, il est possible de reconnaître les grandes familles de tissus.
Les sens sont vecteurs de sensations. Si l’un ou l’autre vient à manquer on se rend compte alors de son importance « un seul être vous manque et tout est dépeuplé ».
Voici quelques mots peu usités qui complètent l’univers sensoriel :
La vue-voir -visuel- cécité
Le toucher- tactile - hypoesthesie
Le goût- goûter- gustatif-agueusie
L’odorat- sentir-olfactif-anosmie
L'ouïe- entendre- auditif-surdité
Par exemple, un simple rhume peut entrainer un diminution de l’odorat, ce qui entraine une diminution du goût. Avec des mains abimées par trop de jardinage, il est difficile d’apprécier la douceur d’un satin de soie.
Goûter à l’aveugle un légume rend difficile la reconnaissance de ce que l’on à en bouche. 
Pour les fibres textiles, ce sont des expériences similaires avec des résultats similaires. Les cinq sens sont comme les cinq doigts de la main, ils forment un tout, ils sont inséparables.

Les tissus "sens" dessus-dessous
Je vous livre ici quelques unes de mes réactions, de mes émotions, de mes souvenirs textiles. Pour chaque individu la sensation, les réactions, les émotions sont différentes. Je vous invite à essayer, vous n’aurez besoin d’aucun matériel, il suffit de faire l’expérience avec les vêtements que vous portez et un soupçon d’imagination.
  
La vue d'un taffetas gorge de pigeon, me transporte dans le monde irréel de la couleur qui n'est qu'imaginaire, qui n'existe que par la présence de la lumière, ce n'est qu'une sensation, une vibration, subtile sans doute, subjective évidemment, mais qui  exacerbe ma sensibilité.
Le toucher
 ruisselant d'un satin de soie provoque chez moi une réaction épidermique qui me donne la chair de poule. Tout aussi curieux, j'ai connu parmi mes clients des personnes qui, pour la même raison, ne supportaient pas de toucher un velours  de soie, ni  même de coton, qu'il fusse côtelé ou lisse. Pour moi, ce hérissement des poils n'implique pas un rejet, c'est simplement un phénomène qui prouve que l'étoffe ne m'est pas indifférente, c'est une forme de dialogue qui s'installe entre ce sensuel satin et mon épiderme.
Au final, le toucher est sans doute le plus important puisque l'étoffe qui deviendra un vêtement est destiné à rencontrer notre peau à un moment ou à un autre ; une évidence que l'on oublie souvent : si le vêtement protège, masque, ou sublime notre corps, c'est le contact avec notre peau qui est en jeu, alors autant qu'il soit à notre goût. Or, chaque individu réagit différemment à une texture, certains préfèrent un toucher rugueux, d'autres se laissent tenter par plus de souplesse, alors que beaucoup aiment la douceur... Le but est que vous trouviez le tissu qui vous convient. 
L'odeur de la laine mouillée me renvoie à mon enfance, lorsque l'on osait laver ma "coue", ce minuscule morceau de ma couverture de naissance dont je ne pouvais me passer pour m'endormir. Sacrilège, ce bain annuel de mon doudou était une catastrophe, il sentait bon le savon mais il avait perdu son identité, les fibres de laine ne diffusaient plus le parfum  de ma mère. Le tissu était alors pour moi un réconfort, mais je ne me doutais 
pas encore qu'il allait devenir mon ami pour la vie.
Le goût ne doit pas être exclu de cet atelier, même si l'exercice est plus délicat.
Un fil de lin me suggère un monde de sucreries, une montagne de bonbons. Pourquoi ? Peut être parce que le morceau de lin que j'ai porté à ma bouche était rose et sans doute parce qu'il m'a vraiment laissé un goût délicieux. Le lin est savoureux. C'est ce que l'on nomme umami au japon (de umai = délicieux et mi = goût). Ainsi, le goût savoureux est considéré comme l'une des cinq saveurs de base avec le sucré, l'amer, le salé, l'acide.
L'ouïe est un moyen quasi infaillible pour les afficionados de reconnaître un tissu. L'oreille perçoit aisément la différence entre un pongé de soie et une toile de laine que l'on déchire. Le bruit devient un cri strident lorsqu'il s'agit de la soie que l'on coupe ou que l'on déchire. 

Le bruit d'un morceau de coton que l'on déchire est "sourd", grave,  long. Je me souviens du bruit du chiffon que l'on déchire nerveusement pour faire un pansement de fortune. Ce n'est pas le même son que provoque le froissement d'un taffetas. Il "cracote", il gémit, il tremblote, ce bout de soie rigide, cassant, luisant... Il ravive mes souvenirs, me voilà dans la salle Richelieu de la Comédie Française, au moment de l’entrée en scène d’Agnes dans l’Ecole des femmes  de Molière, le léger frou-frou de sa robe n’est audible que  pour les spectateurs des  premiers rangs, mais quel délicieux murmure qui annonce l'arrivée de la comédienne. Un bruissement délicat, élégant, subtil, aigu, c’est une jubilation… Ici on ne triche pas avec les costumes, c’est un taffetas de soie à n’en pas douter.  Songez combien le bruit est étouffé lorsque l'on manipule un article en laine, le silence profond inonde une pièce où l'on manipule un métrage de Harris Tweed, un peu comme des pas dans la neige poudreuse. Le langage des étoffes passe aussi par le son, c'est une évidence.

Ces exemples sont évidemment subjectifs, ils appartiennent à mon histoire. Mais dans votre histoire il y a certainement une place pour les étoffes. Si vous souhaitez pousser un peu plus loin vos connaissances sur l'univers textile d'une manière ludique alors cet atelier est fait pour vous.

Pour plus d'informations vous pouvez me joindre à l'adresse mail suivante : degillestissus@free.fr



mercredi 28 novembre 2018

QUESTIONS /REPONSES

Si vous voulez que je réponde aux questions que vous me posez dans vos commentaires, laissez moi  votre nom et votre e mail.  Merci

mardi 13 novembre 2018

L'ART ET LA MATIERE : LES IKATS EN OUZBEKISTAN



Boukhara, Samarkand, villes mythiques qui jalonnent une des  routes de la soie, ce sont des noms qui longtemps m'ont fait rêver. D'abord, lors de mes études à l'Ecole du Louvre, je découvris les villes à travers leur patrimoine historique notamment l'architecture, les portes monumentales, les coupoles turquoises, les écoles coraniques, les mosquées,  puis ce fut par le biais des célèbres tapis de Boukhara que je rencontrais encore une fois  l'Ouzbékistan




le turquoise du dôme sur le bleu du ciel  cette image à elle seule vaudrait le déplacement


une mosaïque de couleurs obtenue avec  une juxtaposition d' adras et
d'atlas 
Longtemps je  n'ai visité ces sites que par procuration, à travers des récits d'explorateurs, des livres d'art et des photos. Je n'avais jamais rencontré une personne physique qui était allée dans ce pays. Jusqu'au jour où un ami, grand voyageur, me parla de son séjour en Ouzbékistan avec tant de poésie, de convictions, d'émotions, de ferveur, que ma curiosité fut mise à rude épreuve. Mon imagination n'eut de cesse de rencontrer enfin la réalité. Je fut conquise, séduite, angoissée et excitée à l'idée de faire ce périple en Asie centrale.

le pays des Atlas satin de soie


un exemple d'abr (nuage)
un détail de suzani. Broderie main, point de chainette provenance Boukhara Le fil de soie sur fond satin de soie

Suzani, mot persan signifiant aiguille. Ce sont des panneaux brodés  aux dimensions variées qui  à l'origine ornaient les murs des palais comme des maisons particulières.




 macro photographie d'un ikat soie et coton   Adrass






le turquoise du dome sur le bleu du ciel  cette image à elle seule vaudrait le déplacement


une mosaïque de couleurs obtenue avec  une juxtaposition d' adras et
d'atlas 
Je ne connaissais ces sites que par procuration, à travers des récits d'explorateurs, des livres d'art et des photos. Je n'avais jamais rencontré une personne physique qui était allée dans ce pays. Jusqu'au jour où un ami, grand voyageur, me parla de son séjour en Ouzbekistan avec tant de poésie, de convictions, d'émotions, de ferveur, que ma curiosité fut mise à rude épreuve. Mon imagination n'eut de cesse de rencontrer enfin la réalité. Je fut conquise, séduite, angoissée et excitée à l'idée de faire ce périple en Asie centrale.

le pays des Atlas satin de soie


un exemple d'abr (nuage)
un détail de suzani. Broderie main, point de chainette provenance Boukhara Le fil de soie sur fond satin de soie

Suzani, mot persan signifiant aiguille. Ce sont des panneaux brodés  aux dimensions variées qui  à l'origine ornaient les murs des palais comme des maisons particulières.




 macro photographie d'un ikat soie et coton   Adrass

Alors à mon tour de vous distiller mes impressions sur ce pays oublié, perdu dans les steppes, de vous donner l'envie de visiter ces lieux enchanteurs, au passé chargé d'histoire et au présent riche de mille trésors.
Le saviez vous?
-c'est le pays les tulipes sont originaires de cette région, elles furent ensuite exportées et cultivées en Turquie avant de conquérir les Pays Bas ?
-c'est le pays où les roses poussent comme par miracle, elles sont magnifiques, fleurissent dans les jardins publics, et dispersent un parfum sucré qui vous enivre  ?
-ce fut la patrie du grand Tamerlan, dit Timor le boiteux ? Un guerrier doublé   d'un protecteur des arts et lettres. Il permit à des architectes de talent d'édifier une ville à sa gloire. Des monuments aujourd'hui heureusement restaurés donnent une idée de ce que fut la beauté de cette ville.
-Ce fut longtemps le"grenier à coton" de  l'URSS?  Aujourd'hui à force d'épuiser les sols et de puiser des quantités énormes d'eau, la nature est exsangue et le lac d'Aral a quasiment disparu.En effet dans les années 60 le gouvernement soviétique décida de transformer les steppes du pays en champs de coton et de blé  Il fallut irriguer ces cultures et pour ce faire détourner l'eau des deux grands fleuves qui traversent le pays  le Syr Daria et l'Amou Daria c'est le pays de la grenade dont on fait des boissons miraculeuses ?
-c'est est le berceau des Ikats ?  Ces ikats si colorés ne sont-ils pas la représentation de ce pays où la nature et l'architecture rivalisent de couleurs, de formes, de lignes ?    Dans les villes qui sont des Oasis, des jardins au milieu du désert,  les tissus des robes et des manteaux des habitants sont comme des bouquets de fleurs aux couleurs éclatantes qui ondulent dans les rues écrasées sous le soleil. Les textiles,  les couleurs, les motifs, les fibres sont les reflets d'une civilisation. Le tissu est un passeport, un guide, un dictionnaire, une encyclopédie, qui  donne un but à mes voyages et qui permet de communiquer avec les populations locales sans l'aide d'un interprète.

au quotidien  les femmes revêtent encore le costume traditionnel 
Ce territoire baigné de soleil l'été, recouvert de neige l'hiver, nous réserve tant de  belles surprises. Ce voyage demeure une exception dans mes souvenirs de "globe-textiles", parce que encore presque vierge de touristes, avec une production locale artisanale qui perdure malgré une économie très difficile mais avec une population déterminée à conserver ses traditions.
Les anciens prennent la pose pour une photo souvenir. Les touristes sont rares et sont encore source de curiosité 


 Pour trouver des merveilles, il faut chercher, prendre son temps, avoir de la patience, de la chance, rencontrer les bonnes personnes et bien sur, connaître son sujet. Vous ne trouverez pas les beaux ikats  facilement, c'est un travail, un cheminement, beaucoup d'obstination et au bout la passion qui peut déplacer des montagnes. Les trésors en général sont bien cachés et les découvrir est un honneur.

Il existe encore quelques artisans 

Ce qui m'a étonné durant ce voyage c'est l'attachement de la population à cette tradition textile, confondant les générations. En soie et coton ce sont des adras, en  satin de soie ce sont des Atlas, quant  aux Suzanis il s'agit de  broderies réalisées à la main au point de chainettes sur des supports de soie ou de coton, avec des motifs  traditionnels comme  les tulipes, les œillets, les grenades. Le costume national féminin, robe en atlas, est largement porté par les femmes au quotidien dans les  ville et les campagnes
Dans les villes qui sont des Oasis, jardins au milieu du désert,  les tissus des robes et des manteaux   sont comme des bouquets de fleurs aux couleurs éclatantes qui ondulent dans les rues écrasées sous le soleil. Les textiles,  les couleurs, les motifs dévoilent un instinct de survie, c'est un patrimoine que la population tient à bout de bras, mais pour combien de temps?
Pour moi le tissu est un passeport, un guide, un dictionnaire, une encyclopédie, qui  donne un but à mes voyages et qui permet de communiquer avec les populations locales sans l'aide d'un interprète

au quotidien  les femmes revêtent encore le costume traditionnel 

Les anciens prennent la pose pour une photo souvenir.  Les ouzbecks jouent les touristes, car les étrangers sont encore rare et  demeurent une source de curiosité 


deux générations, mais un même costume traditionnel

Il existe encore quelques artisans 
Ce territoire baigné de soleil l'été, recouvert de neige l'hiver,  réserve tant de belles surprises. Ce voyage demeure une exception dans mes souvenirs de "globe-textiles", parce que encore presque vierge de touristes, avec une production locale artisanale qui perdure malgré une économie très difficile mais avec une population déterminée à conserver ses traditions.

lundi 12 novembre 2018

BILLET DE MAUVAISE HUMEUR : DEMASQUER LE MASQUE

Il s'agit dans ce post de décortiquer l'image idyllique que nous propose l'industrie des cosmétiques. J'ai vu hier un produit de soin que l'on applique directement sur le visage. 




 Prend on encore la consommatrice  pour une imbécile? Voici ce qui est mentionné sur la pochette.



"le masque est en Tencel® un tissu naturel à base d'eucalyptus...Et pour insister sur cette idée de végétal,  rien de plus banal que le dessin d'une   branche de thé sur la pochette.
Le processus de fabrication du Tencel® est réalisé en circuit fermé. La fibre textile est obtenue à partir d'un mélange de pulpe de bois qui peut être de l'eucalyptus)  d'eau et d'un solvant  récupéré et non déversé dans la nature  "avec l'eau du bain". Il est précisé que dans ce cas aucun polluant ne pourra nuire à l'environnement ce qui sous entend qu'il s'agit bien d'un produit polluant. Le Tencel® n'est pas en cause ici, c'est simplement une information erronée  qui apparait dans la présentation du produit qui me gêne. Pourquoi accoler le mot  naturel au Tencel®, simplement pour être dans l'ère du temps?
Comme pour le modal, le Tencel® est une  sorte de viscose, améliorée donc une fibre chimique artificielle et non pas naturelle, bien qu'issue de matière première végétale. Le Tencel® est apparu dans  les années 80 dans le but de supplanter la viscose dont le procédé de fabrication s'avérait trop polluant, trop gourmand en eau et en énergie. Petit à petit l'homme s'évertue à copier la nature tout en la préservant. Cependant qui se préoccupe de l'impact des résidus de  produits chimiques contenus dans les fibres textiles et absorbées par simple contact avec la peau?
Par curiosité j'ai aussi demandé le pourcentage de thé vert dans ce masque miraculeux. J'attends encore la réponse. 

dimanche 11 novembre 2018

LE BON SENS NE DATE PAS D'HIER


“La manière de se vêtir est aussi grande que la diversité des nations. Ce qu’il y a de singulier c’est que de toutes les espèces d’habillements nous avons choisi l’un des plus incommodes et que notre manière quoique souvent imitée par d’autres peuples de l’Europe, est en même temps de toutes les manières de se vêtir celle qui demande le plus de temps et qui parait la moins assortie à la nature” Buffon


JE SUIS LA FILLE QUI MURMURE A L'OREILLE DES TISSUS

Regarder un tissu c'est un acte bien banal, disons automatique c'est quelque chose qui se trouve dans notre champ de vision, il fait partie d'un tout, de l'environnement, du décor, mais voilà, le quotidien gomme la curiosité
 
Voir un  tissu c'est plus que regarder c'est une action voulue, un acte  réfléchi, comme entendre c'est plus qu'écouter
Voir un tissu c'est le découvrir  avec une loupe et pour les professionnels avec un compte fil (qui ne quitte jamais le fond de  leur poche)


Comprendre une étoffe c' est encore une autre option. Ce n'est pas avec l'aide d'une quelconque machine, loupe microscope, compte fil, c'est une accumulation de connaissances, c'est un échange, c'est épidermique, on se glisse entre la chaîne et la trame, on pénètre la fibre, on soupèse la matière, on scrute la couleur, on estime la main. La subtilité d'un motif, la légèreté du tissage, l'intensité de la teinte, le toucher de la matière, tous ces éléments entrent en ligne de compte, mais c'est avant tout un accord, une entente, une affinité avec ce produit. En fait, tous nos sens sont en émoi lors d'une rencontre  entre une étoffe et nos sens

 C'est une joie de toucher, c'est un événement de sentir, c'est une découverte de goûter, et c'est encore un plaisir de voir des fibres textiles s'emmêler, se chevaucher, se superposer, se croiser pour au final donner naissance à un tissu. 


Cette direction, voilà longtemps que je l'ai empruntée. Etrange peut être, mais confidence pour confidence, j'aime les tissus, je me sens aussi bien parmi eux qu'au milieu d'un jardin, je parle aux arbres, aux fleurs, aux plantes, 
je les complimente, parfois je les gronde, souvent je les admire. Et bien, mon rapport avec les tissus est très similaire. Chaque matin en ouvrant le magasin ce sont des amis qui m'accueillent, ils me  rassurent, ils m'encouragent, ils sont là, fidèles et fiers. C'est toujours avec un pincement au cœur que je me sépare de l'un d'entre eux, mais c'était le deal dès le début, et je sais que la personne qui les achète les aimera aussi. Ensemble, en vous attendant nous discutons en silence.
Saviez-vous que dans certaines civilisations, chez les indiens d'Amérique par exemple, on ne coupe pas le tissu, on n'interrompt pas le fil de la vie, on ne coupe pas la parole ; c'est pourquoi le vocabulaire vestimentaire est réduit et les vêtements plus souvent drapés que coupés cousus. Par respect pour le tissu, pour ce flot de fil, cette abondance de matière, on se doit de lui conserver son identité, donc sa globalité.
 Je les connais presque tous, je sais où ils se trouvent, et dans ce désordre qui n'est qu'apparent, je connais chaque habitant. Cet univers fait de couleurs et de matière  dans lequel j'évolue, me passionne. Chaque jour je  retrouve, je redécouvre, un imprimé attire mon regard et je pars dans mes rêves, je m'évade sur le dos d'un nénuphar, je courre après un oiseau, je délire à travers les méandres d'un ikat.
Les tissus et nous cela peut aussi être une histoire d'amour. Souvent, lorsque je demandais aux visiteurs de la boutique De Gilles s'ils avait besoin d'aide, et souvent j'endentais la même réponse , de la part des femmes plus que des hommes :  "merci, mais je cherche le coup de foudre", un tissu dont je ne me lasserai pas, une étoffe qui me ressemble, celle qui me plaira. En fait, le tissu idéal, mais cette quête est-elle un rêve ou une réalité, mais je suis certaine qu'il existe quelque part un tissu qui vous est destiné… Cherchez le.  N'est-ce pas là un vocabulaire amoureux ?
Alors oui vraiment, prenez le temps de choisir, de trouver le tissu de vos rêves, prenez le temps de faire connaissance et  vous ne regretterez pas ces quelques instants consacrés à ce monument créé par la main de l'homme. Au nom des tissus, je vous remercie d'avoir pris conscience de leur existence et de la place qu'ils occupent dans votre univers.