De Gilles tissus : une passion textile.

Ce blog est le reflet de mes passions : l'art et l'histoire grace à mes études à l'Ecole du Louvre, le textile domaine que je cottoie depuis ma plus tendre enfance, et les voyages. Ici je vous dévoile mes impressions, je vous confie mes émotions, et je partage avec vous mes rencontres. Que vous soyez curieux invétéré, amateur éclairé ou novice passionné par le monde des tissus alors cet espace est aussi le votre. Catherine Kouliche- Goldman Directrice de De Gilles Tissus.

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vendredi 31 janvier 2014

BLOG CONSO COMMENT S'HABILLER VEGAN?


QUELLE ALTERNATIVE POUR LES VEGANS "VERTS"?
Pour tous ceux et celles qui vivent en harmonie avec la philosophie végane mais qui ne supportent pas le contact des fibres chimiques sur leur peau, qui pour des raisons médicales (allergies, rougeurs) ne peuvent porter de vêtements en fibres chimiques, qui ne trouvent pas dans ces articles le confort qu'elles attendent,  ou bien qui ne souhaitent pas participer à  la pollution de l'environnement du fait des différentes phases de transformation du produit d'origine ( bois, pétrole, charbon..) en produit textile,  il  existe une alternative  : ce sont les fibres végétales largement présentent dans le commerce, et minérales plus rares et plus onéreuses (or, argent, cuivre).
L'été optez pour  les espadrilles, semelles en chanvre et dessus en coton, et pourquoi pas les sabots en bois, de plus en plus légers et tendance pour les citadins.


FAIRE ENTRER LA NATURE DANS VOTRE DRESSING
 Les étoffes en  fibres naturelles  ne vont pas à l'encontre des convictions des végans. Ce régime vestimentaire mérite non seulement une  attention  particulière mais dans l'idéal il devrait être varié  dans les formes, les couleurs et dans le choix des matières. Toute une garde- robe en fibres  synthétiques ou artificielles cela manque de fantaisie  et s'habiller peut devenir ennuyeux. Je comprends que la facilité guide parfois le  choix des consommateurs,  et puisque l'industrie  qui produit des fibres chimiques  n'utilise ni laine, ni soie, ni cuir  en un mot pas de risque de se tromper dans la selection des articles, vêtements ou accessoires proposés. Mais d'un autre coté, cette industrie est très polluante alors si vos convictions vous entrainent vers une diminution de la  pollution environnementale pourquoi ne pas vous tourner aussi vers les produits textiles comme le coton le lin  ou le chanvre ? Cependant il faut être conscient que les fibres végétales non issues de l'agriculture biologiques ne sont pas sans répercussions sur la pollution des eaux, de l'air, et sur la santé des ouvriers qui  travaillent dans   les champs de coton, puisque  pour accroitre le rendement il faut utiliser des défoliants et quantité d' engrais chimiques. Donc à moins de vivre nu, notre vestiaire textile aura un impact sur l'environnement, mais on peut imaginer qu'en faisant des choix intelligents les répercussions négatives seront minimisées. Le choix est contraignant, mais le choix existe.

UNE PROPOSITION HONNETE
Vous ne trouvez pas ce qui vous plait dans le commerce, rien ne vous va dans le prêt à porter "vegan" alors  mettez vous ou renouer avec la couture plaisir. Sinon  cherchez quelqu'un dans votre entourage qui pourrait faire vos vêtements. Ensuite il vous restes à choisir  le modèle et le tissu en adéquation avec votre engagement et à votre gout.

LE BIO PEUT ETRE,  MAIS PAS LES YEUX FERMES
Le bio n'est pas la panacée il faut être attentif, et lire entre les lignes des étiquettes. Exit les produits contenant du E 124, exit le cuir végétal même avec un tannage naturel, exit les mélanges laine/lin, coton /soie....etc

MISER SUR LES  TECHNIQUES ANCESTRALES
Commençons par les articles imperméables. Une toile de coton, un peu d'huile de lin et voila un coton huilé, qui vous protégera des intempéries. La marque Barbour,  propose depuis longtemps des vêtements de protection (pluie, vent)  en coton huilé. La gamme s'élargie  à chaque collection, pour homme, femme, enfant avec une jolie palette de couleurs pour les vestes, les blousons, les trois-quart, ou encore les gabardines
Si vous voulez confectionner votre vêtement,  De Gilles Tissus vous propose des cotons huilés. Si vous voulez imperméabiliser un vêtement  il est possible de le faire avec un produit  en aérosol ou avec de "l'huile de coude" et  de l'huile  de lin ou bien vous pouvez acheter de la cire prévue à cet effet dans les boutiques Barbour ou la commander sur le net.. La marche à suivre est largement expliquée sur les sites internet. N'oubliez pas une bonne doublure en coton gratté, ou pilou et vous voilà à l'abri des frimas.

LE COTON GRATTE POUR L'HIVER
On imagine le coton réservé aux périodes chaudes,   sachez qu'un coton gratté celui qui est utilisé pour fabriquer des" sweat" est tout à fait adapté à l'hiver.  Pour doubler un manteau utilisez du molleton de coton placé entre le tissu extérieur et la doublure, chaleur assurée. Les fibres entremêlées vont conserver la chaleur, former une sorte de barrière entre l'extérieur et vous.

LES TOILES DE COTON POUR L'ETE
C'est  l'occasion de porter à même la peau, en sous vêtement par exemple des articles en coton. Les chaussettes, les nuisettes, les slips, les soutien gorge en coton sont indiscutablement plus confortables et plus hygièniques que les articles en microfibres ou seconde peau, car il est possible de les laver à l'eau chaude voir de les faire bouillir ce qui est fortement déconseiller avec les fibres chimiques.
Ce n'est pas parce qu'il faut surveiller la composition des étoffes qu'il faut passer outre sur votre confort.

UNE FIBRES MAGIQUE ET NATURELLE : LE CHANVRE
Pour vous messieurs et pour vous mesdames n'oubliez pas cette fibre magique qu'est le chanvre. Pas de pollution des sols, pas d'engrais ou de pesticides et surtout une étoffe qui se porte été comme hiver, avec autant de bonheur. Le chanvre est une matière isotherme, qui n'engendre aucune allergie. C'est idéal pour les chemises, vestes, pantalons... C'est sans interdits, alors à essayer dès que possible

LE SABRA UNE "SOIE" VEGETALE
Dans un autre registre  voici un produit peu banal, une soie végétale venue du Maroc : le sabra. C'est avec les fibres contenues dans les feuilles de l'aloe vera que les artisans marocains tissent de magnifiques étoffes, qu'ils teignent avec des colorants issus du monde végétal et minéral.  Pour des vêtements habillés, féstifs, élégants, soyeux,  c'est vraiment une fibre qui permet des tissages décoratifs  pour donner de l'éclat, de la couleur et un peu de naturel dans les  appartements (rideaux, coussins, plaids...)

DES FIBRES A REDECOUVRIR
PENSEZ A LA RAMIE
Une fibre végétale, sorte d'ortie, qui ressemble au lin. Le tissage de  cette fibre donne  un tissu plus ferme que le lin, plus brillant et souvent plus fin . C'est une petite merveille pour l'été. Vous la trouverez le plus souvent  en maille (t-shirt)  mélangée ou pas avec du coton et plus rare mais  si vous la chance de trouver des chemises, des pantalons ou des robes, n'hésitez pas c'est vraiment une belle matière. Le lin est frais l'été, la ramie est froide c'est pourquoi  la ramie tout comme le lin peut être utilisée pour les draps ou les taies d'oreiller.  La ramie est une fibre qui réclame beaucoup de travail pour la transformer en fil,  la mode ne la mentionne quasiment pas,  sa vente est confidentielle,   ce qui  explique que son prix soit plus élevé que celui du lin ou du coton

LA TOURBE
La tourbe est la grande oubliée de notre société.. Cette matière est extraite d'un charbon naturel : la tourbe. Les tourbières sont nombreuses dans le monde en Europe on les trouve essentiellement  en Irlande,  dans les pays scandinaves. Les autochtones s'en servent de combustible comme nous nous servons du bois ou du charbon. Mais ce produit est à usage multiple, on peut extraire de certaines tourbes des fibres qui sont suffisamment longues pour être filées et ensuite mélangées à du coton on peut obtenir des textiles très étonnants et bourrés de qualités
 Longtemps elles furent utilisées pour leur capacité à absorber l'humidité ambiante donc la transpiration humaine, mais aussi pour leur pouvoir isolant très important. Jusque dans les années 1930 les hommes portaient des ceintures de santé en flanelle ( mi laine mi tourbe ou mi coton mi tourbe). La tourbe textile se mélange  au coton, au lin, au chanvre, permettant d' améliorer le pouvoir calorifique des fibres végétales. Une autre qualité que possède la tourbe c'est de capter les odeurs. Il semblerait qu'en Finlande on utilise encore cette fibre dans le domaine textile. Aujourd'hui son potentiel n'est pas exploité à sa juste valeur. Seule l'industrie papetière l'utilise en quantité.


DES FIBRES ANECDOTIQUES

LE SASAWASHI
Les japonais sont très fort dans le domaine des textiles naturels et dans la fabrication du papier contrairement à ce que l'on peut croire, en voyant toutes ces étoffes techniquement très élaborées qui sont fabriquées au pays du soleil levant.
J'aime l'idée de ce tissus fabriqué avec l'herbe des ours, ou kumazasa une sorte de bambou nain qui pousse sur l'ile d'Hokkaido ; son nom suffit à faire voyager il s'agit du  sasawashi.
Pourquoi l'herbe des ours? Parce que avant l'hiver, avant leur hibernation les ours vont se gaver de cette herbe, qui va leur permettre de passer ces quelques mois tranquillement grâce aux propriétés anti-bactériennes, anti allergiques  de cette plante. Mais quel rapport entre les ours et le tissu?
Simple, les fibres du kumazasa sont  transforméesf en une "nappe" de papier(washi) qui sera découpées en fines et longues lamelles qui seront twistées avec un fil de  coton, de lin ou de chanvre et le résultat est une étoffe solide, originale, naturelle, lavable, et qui conserve toutes les propriétés du kumasaza, contrairement au tissu dit "bambou" qui ne possède plus aucune des qualités intrinsèque du végétal puisque la fibre à subit une série d'opérations chimiques avant d'être transformée en fil, puis en tissu.
La fabrication du sasawashi  n'entraine ni déforestation (le kumazasa pour très rapidement, sans aucun angrais) et il n'entre aucun produit chimiques dans la fabrication de cette étoffe. Toutes ces qualité en font un tissu qui est adapté pour les serviettes de toilette, les chaussettes et les vêtements.

Les tissus ethniques fabriqués artisanalement  sont  de véritables trésors. Les artisans travaillent des matières premières locales
A Madagascar on peut trouver un tissage hybride mais entièrement végétal :  en chaine des fils de coton et en trame  des racines de vetiver. Un peu rigide pour du vêtement, mais en décoration, posé sur une fênetre il se transforme en pare-soleil et en plus il parfume délicatement la pièce où il se trouve.

En Birmanie  on file et on tisse la fibre de lotus royal. Si vous aimez le toucher du lin et la rusticité de la bourette alors le tissu en fibre de lotus, venu du lac Inlé  est fait pour vous.

Au Pérou  le coton biologique est un produit très répandu. La majeure partie de la production est exportée. Ne regrettez rien car  sur place les modèles ne sont pas toujours très afriolants, pour être plus explicite, ils ont souvent l'air de sacs à patates, mais il est toujours possible d'acheter la matière première et de faire faire vos vêtements en choisissant votre modèle.

Aux Philippines Carmen Hijosa,  a développée une industrie de transformation très originale. A partir des feuilles d'ananas qui poussent en très grande quantité dans la région elle obtient un simili cuir. Sacs, chaussures, vestes tout est possible désormais avec cette matière qui ressemble au cuir, qui m'a t on dit en a la solidité et la souplesse. La société s'appelle Pinatex.
La fibre d'ananas est utilisée aux philippines depuis le XVIIeme siècle , filée et tissée la fibre est utilisée pour la confection des "barong tagalog", chemises que les hommes portent pour les grandes occasions. Pour fabriquer un mètre carré de cuir d'ananas il faut 16 ananas.


LES TISSUS A MEMOIRE DE FORME
A employer avec modération.Pourquoi,  modérer votre engouement pour ces tissus? Pour deux raisons, la première est le poids et la seconde c'est le prix. Mais pour les curieux, c'est vraiment étonnant.
Ces étoffes sont fabriquées avec des fils de coton et de métal, c'est le métal qui permet de former, de déformer, de donner un mouvement à un vêtement, puis de l'annuler, on gomme, ou  plus exactement on repasse et on recommence autre chose ; c'est un peu le principe de la pâte à modeler,  amusant, et qui se plaindrait  de faire de la mode un jeu?
Il existe des tissus métal/coton ou lin plus légers, plus souples presque fluides qui ne transformerons pas votre veste en armure. Un fil de coton ou de lin en chaîne et fil de métal en trame. et le tour est joué C'est permis pour le régime vestimentaire végan. En robe, manteau, gilets ou accessoires ceinture ou sacs....l'effet est assuré et l'originalité en prime.


DES IDEES POUR L'ETE
Les fortes chaleurs n'incitent pas vraiment à porter des articles en fibres chimiques. Les fibres végétales sont plus adaptée à ce moment de l'année pour constituer votre garde- robe. Testez le lin, mais aussi la ramie et le chanvre. Le surseecker, un coton et polyester qui ne se froisse pas, qui se lave en machine, c'est super. L'organdi, un coton apprêté léger et fin qui à une tenue exceptionnelle pour des vêtements très structurés.

PEUT ON FAIRE UNE EXCEPTION AVEC UNE SOIE QUI NE MALTRAITE PAS LES ANIMAUX ? OUI SI  J'EN CROIS SINGER NON SI  J'EN CROIS  REGAN
Connaissez vous la soie sauvage? Rien  à voir avec la soie naturelle, les chenilles Antheraea vivent à l'état sauvage, elles ne sont pas nourries par l'homme, elles ne sont pas élevées par l'homme.  Elles vivent leur vie sans avoir besoin de la présence de l'homme, se nourrissent des feuilles de chênes , la chenille se fait chrysalide puis papillons. Le cocon est percé par l'animal  qui sécrète un produit qui dissout la fibre de soie dont est fabriqué le cocon, lorsque le papillon est fin prêt à s'envoler.  Ces cocons  abandonnés par les animaux sont ramassés au pieds des chênes nourriciers et  puisqu'ils sont percés ils ne peuvent pas donner un fil continu et régulier comme ceux des bombyx du mûrier . Le tissage de ces fils discontinus et moins fins donne des étoffes moins brillantes avec une surface "accidentée". Les articles ainsi réalisés sont plus rustiques, mais la soie sauvage possède les qualités intrinsèques de la soie. Il ne faut pas confondre douppion de soie,  et soie sauvage autrement appelée tussor  ou tassar en Indes. Si ce tissu s'est développé en Inde alors qu'en Chine et au Japon  ce sont des élevages de bombyx du mori qui sont  plus importants, c'est parce que des religions comme le Jaïnisme et le bouddhisme prônent la non violence ce qui implique le respect aussi des animaux. Les vaches sacrées en sont peut être l'exemple le plus célèbre. Ce sont donc avec des préceptes religieux qui ne sont pas éloignés des règles de vie du véganisme que le tissage de soie sauvage c'est développé dans cette région du monde.  
Ainsi donc si la vie de ces animaux n'est pas mise en cause, que la liberté est au bout de leur métamorphose  peut être vous est il permis d'utiliser cette étoffe si vous faites partie des réformistes, et que vous vous sentiez plus en adéquation avec l'approche philosophique de Peter Singer qu'avec l'approche abolitionniste de Tom Regan et Gary Francione.

Cette liste n'est pas exhaustive, mais elle vous permettra de piocher en fonction des saisons et des occasion, dans l'univers textile plus  varié qu'il n'y parait.









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jeudi 30 janvier 2014


Publié par goldman à 23:14 Aucun commentaire:
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BLOG/CONSO N°1 : UN REGIME VESTIMENTAIRE VEGAN.


PREAMBULE
C'est à la suite d'une rencontre avec une  adepte du véganisme, venue acheter du tissu dans ma boutique, que l'idée de ce post  m'est venue.
Elle cherchait un tissu qui ne contenait ni laine, ni soie, en fait une étoffe qui n'aurait aucun lien avec le monde animal. Curieuse, comme  à mon habitude, je  lui demandais quelle était la raison de cette recherche spécifique : d'ordre médical? religieux? ou simplement par goût? Mon interlocutrice m'expliqua brièvement qu'elle était végane, le véganisme étant un mouvement  implanté aux USA depuis longtemps et plus récent en France. C'est ainsi que je découvris les codes qui régissent le mode de vie  du véganisme. Le premier et plus important point étant la condamnation de la consommation de tout produit issu des animaux qu'il s'agisse d'aliments, de vêtements ou d'accessoires. Nous parlâmes des difficultés qu'elle rencontrait pour trouver les bonnes matières textiles.
Le but de ce post est d'aider les véganes à se constituer un vestiaire à la fois confortable, élégant, fonctionnel, écologique si possible mais toujours en  respectant les fondamentaux du véganisme. J'espère apporter ma pierre à l'édifice en élargissant le choix à des matières plus rares, plus étonnantes, moins connues, insoupçonnées, artisanales ou industrielles.

UN VESTIAIRE RESPECTUEUX DES INTERDITS
Un des problèmes à résoudre pour les personnes qui observent les règles du véganisme au quotidien, se situe au niveau de l'habillement. Certes les interdits vestimentaires sont énoncés avec moult précisions mais il est parfois difiicile de savoir comment et avec quoi sont confectionnés les articles textiles que l'on trouve dans les commerces traditionnels. Les matières colorantes peuvent être obtenues à partir de tout ou partie de corps d'animaux. Ainsi, le E 124 colorant rouge ponceau ou rouge cochenille, colorant alimentaire et textile est obtenu par le broyage de petits animaux, les cochenilles qui vivent sur les cactus au Pérou et au Mexique. Les étiquettes  précisent  rarement et même jamais l'origine des teintures, et pourtant de nombreuses personnes sont allergiques à des produits utilisés dans les colorants. Le cuivre peut provoquer des rougeurs, des démangeaisons.Trouver les produits dans la fabrication desquels n'entre aucune substance animale, ni dans les fibres ni dans les teintures,  peut  s'assimiler à la quête du Graal. Il existe des sites, des boutiques en ligne ou des magasins traditionnels qui  proposent une sélection d'articles adapté à une demande particulière, et spécialement pour les végétariens et les végans.

EXIT LAINE, LANITAL, SOIE NATURELLE ET CUIR, VEGETAL OU PAS.
Après avoir écarté de votre armoire les articles en  laine provenant pour la majorité de la toison des moutons (sachez que le feutre et non le feutrine, est fabriqué avec des poils d'animaux), les articles en lanital, fibre chimique à base de protéine animale (caséine du lait), le cuir obtenu avec les peaux tannées de vache, bœuf, mouton, chèvre. la soie matière première qui constitue les cocons des vers à soie, il vous reste les fibres végétales, minérales et les fibres chimiques (artificielles et synthétiques) pour votre garde-robe.
Prêtez une attention particulière aux fournitures, examinez à la loupe des détails qui de prime abord ne se voient pas, mais qui sont souvent indispensables pour la fabrication d'un vêtement.  Dans les vêtements de protection style doudoune, ecarter tout article qui est rembourré avec des plumes ou du duvet, et choisissez les vêtements rembourré de polyester, peut être moins chaud, mais végans.   Pour avoir plus chaud en période très froide n'oubliez pas que la meilleur solution reste la "pelure d'oignon" c'est à dire la superpositon de couches textiles par exemple un sous vêtement, plus un chemisier ou un sous pull, plus un gros pull, et ensuite le manteau, ou la veste ou la doudoune. Selon la température intérieur/ exterieur vous retirez   vous en rajouter un article, et ainsi vous serez toujours au top, ni trop chaud ni trop froid. 

La doublure d'un vêtement haut de gamme est parfois en soie (pongée), le feutre utilisé pour donner du maintien au col (costume d'homme) est composé de brins de laine agglomérés, les entoilages classiques sont en laine et poils de chèvre, les surpiqûres, les boutonnières et les boutons peuvent être cousus avec des fils de soie. Et pour terminer cette liste, il y a les boutons qui eux se voient. Eliminez les boutons  en corne, en cuir, ivoire ou en nacre puisque tous issus du monde animal (coquille, peau, corne).
Préférez le corozo (obtenu à partir du fruit d'un palmier) ou encore le tagua autrement appelé ivoire végétal, et sans controverse cette fois, puisque la matière provient de la noix d'un palmier qui pousse dans la forêt amazonienne. Au Pérou, en Equateur, en Colombie ou encore en  Bolivie, cet ivoire végétal est largement utilisé; il est  aussi exporté dans de nombreux pays pour fabriquer des boutons, des bijoux, des manches de parapluie, des peignes. C'est une matière intéressante à plus d'un point. Lisse, douce, si sa teinte originelle est le blanc cassé, elle se teint très bien, et son prix est très très accessible. Plus d'ivoire végétal cela entraîne une diminution du braconnage et de la mise à mort des éléphants et des rhinocéros.  N'oubliez pas que les matériaux utilisés pour fabriquer les boutons sont très variés : verre, pâte de verre,  bois, métal, liège, porcelaine, résine, acrylique et bien sûr, plastique.


WELCOME FIBRES CHIMIQUES 
La chimie dans les placards : bien sûr  le recours aux vêtements en fibres chimiques est essentiel pour les végans. Ces fibres se plient à tous vos désirs ou presque, des sous-vêtements aux vêtements de protection en terminant par les accessoires, chaussures, sacs, ceintures, etc.
Les fibres chimiques se sont adaptées aux besoins des consommateurs. Se protéger de la pluie, du vent, du froid, ce sont des choses que les fibres fabriquées par la main de l'homme peuvent faire et avec en prime un côté esthétique qui parfois n'envie rien aux fibres animales.
Sachez ce que vous aller  acheter et ce que vous pouvez attendre des différentes fibres chimiques.

Fibres synthétiques :
Le polyester (Tergal)  créé à l'origine pour remplacer les lainages. Les tissus sont secs, lourds, mats, solides. Ils sont parfaits pour les plissés. Attention, ils sont souvent mélangés à la laine (poly-laine) pour augmenter la chaleur. Ils se présentent sous des poids et des aspects très variés, en fonction de leur destination, mais les finitions, la grosseur des fils peuvent changer l'aspect du tissu. Les microfibres sont des polyester.
Le polyamide (nylon) pour sa légèreté, sa solidité, son imperméabilité. Les toiles de nylon légères et imperméables vous protègent de la pluie, avec les célèbres articles K- Way. Vous êtes frileux ? passons à la version vêtement de protection avec les doudounes en polyamide, doublées en polyester légères et chaudes, et les chaussures qui vous sont proposées dans quelques boutiques et surtout sur internet  sans cuir mais avec des matières synthétiques, parfois du caoutchouc, recyclé ou pas, pour les semelles.
Les chlorofibres (Rhovyl) pour ses qualités : ininflammable, bon isolant thermique, résistant aux bactéries. Ces fibres sont commercialisées en France sous la marque Rhovyl et proposées en produits finis (sous-vêtements) par Damart "froid? moi jamais!" une pub qui a marqué une génération. Le thermolactyl est le produit phare de la marque. Cette fibre entre dans la composition de caleçons, t-shirt, et autres sous-vêtements avec la promesse de soulager les rhumatismes. 
Les fibres chimiques sont de plus en plus performantes tant au niveau du confort que de l'efficacité. La technologie entre dans le vêtement. Sous le soleil de l'été il est de bon ton de porter des t-shirts anti uv.
Pour les personnes qui transpirent énormément des pieds, des chaussettes anti-odeur sont désormais commercialisées et les progrès ne sont pas prêts de s'arrêter, les recherches continuent dans les laboratoires. L'homme n'a de cesse de copier la nature, voire de la dépasser.
Acrylique (Crylor, Orlon), le toucher est doux, proche de celui de la laine, l'aspect des "mailles" acryliques est proche du mohair ou de l'angora. Les articles sont  légers et chauds, la fibre sèche rapidement.
Le PVC ou polychlorure de vinyle. C'est une matière plastique souple, (composée de sel et de pétrole).
Largement utilisé pour fabriquer des articles imitant le cuir. Le skaï est une marque déposée.
Quant à l'Alcantara, il s'agit également d'une marque déposée qui est une imitation du daim en fibres de polyester. Ce tissu ne possède pas d'envers, les deux faces sont identiques, il est imperméable et  lavable. Idéal pour les vêtements et l'ameublement (sièges).

Fibres artificielles
Viscose, fibre chimique qui se rapproche de l'aspect de la soie, Tencel, Lyocell, acétate Arnel, cupro Bemberg, modal... Les fibres artificielles permettent d'obtenir des tissus brillants, souples, soyeux.
Ce qu'il faut savoir au sujet des tissus de bambou. Il s'agit généralement d'une viscose dont la base est la pulpe de bambou. Si les fabricants allaient au bout de leur raisonnement on pourrait parler de tissus de bois (la viscose classique ayant pour base la pulpe de hêtre). Il faut donc être plus rigoureux dans les appellations, mais un consommateur averti saura distinguer le bon grain de l'ivraie.
          Faites entrer la nature dans votre vestiaire en  choisissant des articles en fibres végétales ou                 minérales. Cherchez aussi les fibres naturelles méconnues, inexploitées   comme l' abaca,  la ramie,    le chanvre ou encore la soie marocaine (issue d'une plante)

LE CUIR VEGETAL : UNE APPELLATION TROMPEUSE, MAIS UN VRAI BON PRODUIT VEGAN
 Il existe de nombreux sites surtout anglo-saxons qui proposent sur le net des accessoires comme des chaussures, des sacs et des ceintures véganes, c'est-à-dire fabriquées en matières synthétiques (imitation cuir, caoutchouc de synthèse). Il fait référence à une matière curieuse : le cuir végétal. Cela m'a intrigué au plus haut point, et je suis allée voir sur ce site marchand quel était ce produit étonnant. En fait de cuir végétal, il s'agissait de chaussures en matière synthétique (semelle, doublure et extérieur). Le terme cuir végétal est mal choisi ou plutot trop bien choisi, mais trompeur. Le terme cuir végétal s'applique  à la méthode de tannage de la peau qui est végétale par opposition au tannage traditionnel de l'industrie qui est minéral et plus polluant. Donc attention les végans d'obédiance Tom Regan, ne tombez pas dans le piège, le cuir végétal n'est pas fabriqué à partir de feuillage ou de sève, c'est simplement une peau d'animal tannée d'une manière moins polluante, mais il s'agit tout de même de cuir.
Les sites spécialisés vendent des accessoires  en "cuir vegan" ou vegan leather" c'est-à-dire en imitation cuir parfois doublés en coton comme le propose la marque anglaise Vegetarian shoes. Pas de problème, les articles sont en adéquation avec les idées des végans . La marque canadienne Matt et Nat s'engage à sauvegarder  la nature et assure la protection  des droits des animaux. Ces marques sont respectueuses de ces idées et surfent sur une vague qui milite en faveur des produits bios, naturels et recyclés très en vogue outre-atlantique. Lorsque l'on parle de cuir végan ou vegan leather, on ne parle pas de cuir mais d'un article composé de matériaux recyclé (bouteilles plastiques, pneus réchappés). On peut ainsi dire que le mot cuir est usurpé dans un but commercial. Il semble que proposer des produits en matière synthétique à des prix plutôt élevés serait moins vendeur, l'image serait moins sophistiquée, et dans l'esprit du client le terme cuir est rassurant, concret, alors que le terme synthétique est abstrait, un mot "fourre-tout" et n'importe quoi. Chaussures en cuir végétal végan ok mais pour l'hiver. Choisissez  pour l'été les chaussures, les sacs et les ceintures en fibres végétales et caoutchouc naturel. Le mélange chanvre et coton est idéal pour les espadrilles, un produit hors mode et fort confortable.

Aujourd'hui vous êtes de plus en plus nombreux à modifier votre alimentation et votre vestiaire ; les offres s'affichent désormais dans les boutiques traditionnelles d'alimentation, des restaurants "végan" s'ouvrent dans les grands villes. En France la mode est en passe de suivre ce mouvement, et déjà des marques de chaussures et de vêtements répondent à une demande de plus en plus spécifiques.

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  ALTERNATIVE  POUR LES VEGANS "VERTS" : LES FIBRES VEGETALES, MINERALES, LES FIBRES INEXPLOITEES A DECOUVRIR, FAITES ENTRER LA NATURE DANS VOTRE DRESSING . 
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Publié par goldman à 23:14 Aucun commentaire:
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vendredi 17 janvier 2014

CAMELOT, UN TISSU UNE HISTOIRE

CHAMEAU!
L'origine du mot est probablement une déformation de l'arabe hamlat qui signifie peluche de laine. Francisé il devient camelot, faisant référence à la surface duveteuse, poilue , laineuse du tissu. 
On peut enrichir l'étymologie en y  ajoutant chameau. En effet cette étoffe fut, à une époque, fort luxueuse. Nous sommes dans une histoire similaire à celle du bougran.
Les tisserands utilisaient non pas les longs poils de la toison mais le fin duvet de la sous toison des animaux locaux, c'est-à-dire les chameaux et les chèvres angora vivant en Asie Mineure, actuelle Turquie.

LE CAMELOT, UNE TROUVAILLE DES CROISES
Le camelot fut introduit en France au XIII e siècle au moment  des croisades qui eurent, entre autres effets, un développement des échanges culturels et commerciaux .

DU XIIIe AU XIXe SIECLE, DU LUXE A LA CAMELOTE
Entre le XIIIe siècle et le XIXe siècle le terme camelot désigna plusieurs sortes d'étoffes.
Cette étoffe fut tour à tour un tissu ordinaire, luxueux, médiocre, courant, commun... fait à partir de poil de chameau, de laine de mouton, de poil de chèvre angora, de cachemire, de soie et, à l'occasion, de coton et plus souvent de mélanges improbables ce qui lui vaudra la désignation de camelote.

Au XIVe siècle, c'est un tissu rare importé de Turquie, c'est un luxe que se permettent rois et grands seigneurs.  Un édit de Charles V interdisait aux femmes de basse condition de porter des vêtements fait de drap d'or, de soie ou de camelot. Mais comment auraient-elles pu s'offrir ce luxe?
Au siècle suivant le camelot est devenu un tissu de laine de mouton,  similaire à un satin de laine.

En Grande-Bretagne, le camelot est une étoffe ordinaire, un lainage grossier, style futaine, destiné à la fabrication de vêtements de travail, alors que le camlet est une étoffe plus fine, de belle qualité généralement lustrée par calandrage et teinte en rouge.

Au XVIe siècle le camelot est largement utillisé en ameublement  : de doublures aux courtepointes, rideaux, tentures, garniture de lit.
"Chambre quand j'avay les maulx
d'enfans bien ordonné
de blanc camelot et brodée
et les courtines ensément"
Eustache Deschamps. Mur de mariage.
 "Deux escabeaux garnys de camelot de soye blanche de franges et crespine d'or" Inventaire de Catherine de Médicis.

Au XVIIe siècle le camelot est toujours commercialisé. Mais il semble que son origine soit oubliée. A cette époque  Venise, Florence, Milan exportaient des étoffes à base de soie vers la France où elles étaient teintes en rouge, cramoisie, ou violet et désignées sous le vocable camelot (?). En fait, ce nom était faussement attribué à des taffetas, des tabis et autres étoffes précieuses, déguisées sous un nom d'emprunt afin de faciliter leur introduction frauduleuse en France.

Au XVIIIe siècle, le camelot est encore une étoffe précieuse de laine, de soie et parfois de fil d'or. Chez certains tisseurs, on trouve des camelots contenant des fils de cachemire.
 Le camelot est souvent cité dans les inventaires des personnes de "qualité".
"Dans la salle à manger nous avons trouvé quinze chaises garnies en camelot, une table..." 1792 Inventaire des meubles du château de Chavanicac.

Au XIXe siècle, le camelot n'est plus exporté, mais il est fabriqué en France dans la région lilloise où il devient un article d'exportation. Le camelot est désormais une toile de laine commercialisée sous des noms aussi inattendus que nonpareille, polo mille, quintette.
A Amiens, il est à carreaux ou ondé et se nomme "bangmers". Ce tissu est aussi diffusé sous le nom de camelotin du fait de sa très faible épaisseur et de la médiocrité de sa qualité.

DE LA CAMELOTE
Devant le succès, mais aussi à cause des prix très élevés, les imitations ne tardèrent pas. Pour baisser le prix de revient, les fabricants ne mettaient ni fils d'or, ni fils de cachemire ou de soie, mais de la laine de mouton et parfois de qualité très médiocre.
Ainsi les qualités moyennes de camelot étaient utilisées pour fabriquer de vêtements d'usage courant. Force est de constater que ce tissu au cours des siècles a perdu de sa superbe.
Ce sont ces mauvaises imitations qui donnèrent naissance à une expression passée dans le language populaire : vendre de la camelote.

Et voilà beaucoup de bruit pour rien autour du chameau... Cependant si c'est le chameau qui vous interesse il reste toujours la fameuse couleur poil de chameau et une marque de vêtements "Poil de chameau"
Publié par goldman à 01:59 3 commentaires:
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LE BOUGRAN : UNE PETITE ETOFFE OUBLIEE

SOUVENIRS,  SOUVENIRS
Si je dédie ce post à ce tissu aujourd'hui oublié, c'est par nostalgie. A la manière d'un jardinier qui renoue avec la culture d'anciennes variétés de légumes et qui voudrait partager leur saveur avec vous, mon but est de vous faire  découvrir une étoffe  qui a joué un rôle important bien que peu visible durant des siècles, et dont j'ai entendu parler pendant mon enfance dans la boutique de mon grand-père. Aujourd'hui compte tenu du chemin emprunté par la mode, c'est à dire la simplification, le bougran n'est plus guère utilisé en tant que tel mais il est remplacé par des succedannés comme les toiles thermocollantes, la triplure, et parfois même du carton!
J'enrichie  mon "potager"  au fil de mes souvenirs. Avec le bougran nous traversons le temps et  l'espace,  du XIe au XXe siècle de l'Asie Centrale à l' Europe.

Quelques légumes oubliés accompagnés de quelques noms de tissus de mon potager perso : bougran, mignonette, toile capella...

BANALEMENT UTILE
Bougran, ce mot ne vous dit peut être pas grand chose ; ce fut pourtant un tissu très courant, commun même, durant des siècles. Sa principale destination consistait à renforcer des étoffes, des parties de vêtements comme les cols, les ceintures, les parmentures ou, plus souvent, le bougran était utilisé comme doublure. La production débuta pour répondre à une demande locale car, pour la fabrication des  manteaux traditionnels ouzbeks,  une doublure forte était indispensable. La forme ample et les étoffes souples demandent un support renforcé. Le bougran dans ce cas est cousu entre le tissu extérieur et la doublure.


Photo de famille, en costume traditionnel ouzbek. Tashkent 2005

SUR LA ROUTE DE LA SOIE
Boukhara, cité ouzbek, était le point de départ d'un grand nombre de marchandises spécifiques comme des épices et des étoffes vers les marchés occidentaux dont le bougran faisait partie. Ce mot est une altération de Boukhara. Ville mythique située sur la route de la soie, Boukhara, j'en conviens, est davantage connue pour ses tapis et ses monuments que pour  le commerce de cette toile forte, mais voilà, la réalité est parfois moins poétique.

Vue d'un monument de Boukhara

Tranversant Boukhara, Marco Polo remarqua une fine cotonnade qui s'appelait alors boquerant. Pourquoi et comment cette étoffe commune attira la curiosité de ce grand voyageur ? Après une longue route, boquerant devint bougran en Français et buckram en anglais, une forte toile utilisée en reliure.


Buckram, toile forte de couleur utilisée en reliure.
Une autre hypothèse circule au sujet de l'orgine de ce drôle de nom, mais elle est plus fantaisiste que sérieuse : le mot bougran viendrait de Bulgarie, dont  jadis les habitants étaient des bougres, bigre !

UN MONOPOLE 
Les occidentaux ne se pressent pas d'imiter ce tissu au demeurant fort commun, très utile mais bien banal. C'est sans doute la raison pour laquelle les pays producteurs : Ouzbekistan, Chypre, Inde, Arménie et Kurdistan conservèrent longtemps le monopole du bougran.

DE NOMS EN NOMS, DE SIECLES EN SIECLES, DE TEXTURE EN TEXTURE
Suivant le principe immuable des transformations et des évolutions d'une langue vivante,
le bougran passe de la belle toile de coton surfine à une vulgaire toile grossière et raidie.
Au XIIe siècle, on retrouve cette fine cotonnade raidie dans de nombreux pays sous des appellations diverses. L'action de renforcer une toile donne le verbe bougraner. On peut alors bougraner tout type d'étoffe, en coton, en lin, en laine...

"Tels, les 10 000 Turcs qui sortaient d'Acre sur leurs galères, couvertes comme eux-mêmes d'étoffes de soie, de bougrans et de velours". Grousset, L'Épopée des croisades,1939

En Italie, elle devient bucherame, en Grande Bretagne bukram, bucaran en espagnol. Ces changements n'affectèrent pas uniquement le nom mais aussi la contexture de l'étoffe.
Un temps tissé à partir du lin, puis du chanvre puis en coton, laine et tout autre matériau succeptible d'être tissé. Généralement, le bougran était commercialisé en uni, en blanc, noir, gris. Parfois, pour les reliure, la gamme était élargie.

Au XIIIe siècle, le bougran est devenu un étoffe grossière de laine commune de qualité très médiocre. Son manque de souplesse est adapté à sa mission de doublure, de soutien, pour les étoffes trop souples et les courtepointes.
Au XIVe siècle, le bougran devint un tissu de lin fabriqué à Chypre et en Arménie. A la même époque, c'est une sorte de mousseline de coton légère et précieuse car le coton est encore une fibre rare en Europe. Cette étoffe est alors utilisée par la noblesse. Il est d'ailleurs fait mention de boqueran blanc 
dans la description de la chambre de la reine Clémence de Hongrie.
Au XVe siècle, le bougran est en lin et il est utilisé pour fabriquer les étendards.
Au XVIe siècle, en Grande Bretagne, le buckram est une étoffe laineuse souvent utilisée pour les vêtements cléricaux.
Au XIXe siècle, le bougran est  une toile de coton  gommée et calandrée que le tailleur place à certains endroits du vêtement entre l'étoffe et la doublure pour donner du maintien.

 "En revanche, le col de sa chemise, droit et empesé, lui montait jusqu'au milieu des oreilles; et le collet de son habit, ample, lourd et doublé de bougran, lui montait jusqu'à l'occiput." Hugo, Le Rhin 

 Le chanvre remplaça le coton. Les impératifs de la mode masculine obligent à certaines contraintes et, comme les femmes sont corsetés les hommes enfilent des vestes qui ressemblent davantage à des cuirsasses qu'à des vêtements civils. La silhouette est modifiée, voire déformée et pour ce faire, les tailleurs utilisent ouate, étoupe, enfin ce qu'ils ont sous la main. Il faut donner des formes aux hommes qui justement n'en n'ont pas, renforcer une carrure défaillante par-ci, galber un mollet par-là... Dans son traité de 1769 Gersault insiste : "On taille au prorata une ouate fermée, on l'oure en deux et on la garni de crin à matelas"

Le buste masculin se doit d'être non seulement bien garni mais également bien raide. Les cols et les revers immenses ne doivent pas se relever au moindre courant d'air ; c'est pourquoi les faiseurs utilisent quelques artifices comme les agrafes pour maintenir les cols plaqués contre la poitrine ; c'est ici qu'intervient le bougran. Il sert à raidir l'étoffe. Glissé entre le tissu et la doublure le bougran "arme" la pièce. 

LE BOUGRAN HUGO ET LA MORALE
Il faut croire que les hommes de lettres se préoccupaient de la mode, ou plus justement, que la mode les préoccupaient.  De Hugo à Balzac ils furent nombreux à critiquer la raideur du bougran, allusion feutrée ou pas à la politique.

"Eh bien! de tous côtés, sous mille noms, sous mille formes différentes, nous retrouvons le bougran. Ce respect des convenances, cette hypocrisie puritaine qui pare les dehors sans améliorer les mœurs, c'est du bougran moral." Balzac

LE BOUGRAN, BALZAC ET LA REVOLUTION. 
Balzac lui-même s'insurge contre l'usage intensif qui est fait du bougran "ce tourment des habits à collets et à revers rembourrés drap au dehors, carton en dedans." Détournant  l'objet incriminé de la mode, il en fera une arme politique assimilant ce vêtement lourd et guindé à la politique puritaine, académique et triste de Charles X. Peu avant la révolution de 1830 Balzac en appelle à la révolte de la France contre le bougran.

1830, des silhouettes  déformées, des vêtements rembourrés,  l'usage du bougran est indispensable.

LA LIBERTE SONNE LE GLAS DU BOUGRAN
Jusqu'au milieu du XXe siècle, le costume masculin était encore "rigide" et lourd ; sa fabrication  nécessitait un grand nombre de fournitures afin de lui donner de la "tenue" : épaulettes, mignonnette, bougran, entoilage, feutre, doublure... .



La silhouette apprêtée, la rigidité des vestes, c'est la mode masculine des années 50
Désormais la mode masculine se décline  tout en souplesse et légèreté. Le prêt -à -porter a changé la donne.  Les tailleurs sont des ovnis, et leur production demeure restreinte. La grande diffusion propose des pardessus et vestes rarement entoilées, ou parfois avec de la toile thermocollante. Les tissus à la demande des consommateurs sont de plus en plus légers, de plus en plus souples, les supers 100 sont dépassés par les supers 180, 200, ce qui relègue aux oubliettes notre bougran, sujet de ce post.

Au XXIe siècle, le consommateur se détourne du vêtement guindé, lourd, contraignant pour le corps, c'est pourquoi les fournitures pour tailleurs ne sont plus guère utilisées. On allège, on dégraisse, on simplifie, on supprime tout ou presque du squelette d'un vêtement : l'entoillage, les épaulettes, la ceinture de pantalon, la mignonnette ou doublure de manche, les boutons de rechange.  On baisse le prix mais jusqu'où iront les industriels, restera-t-il encore du tissu dans le vêtement ? D'ailleurs, on constate que le métier de tailleur à tendance à disparaître. Ces hommes de l'art sont en France remplacés par des "retoucheurs pendant  que, de l'autre côté de la Manche,  la "caste des tailleurs de  Savile Row " se perpétue avec élégance! 
BEAUCOUP DE BOUCAN POUR LE BOUGRAN
Eh oui, j'en parle, je le décris, mais malheureusement je n'en vends pas, enfin je ne vends pas de réel bougran. Peut être pourrez-vous en trouver, au hasard de vos recherches, mais souvent on vous proposera n'importe quelle cotonnade un peu raide.  2014, et le bougran n'est plus qu'un mot qui ne correspond plus à un article mais à une catégorie de toile grossière et forte.
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