Le damassé c’est une
technique de tissage qui somme toute est assez connue, mais peut être trop car
si l’on veut vraiment aller à sa rencontre quelques notions de base s’avèrent
nécessaires.
La fabrication de ce tissu
fut longtemps réservée à un genre d'article dit "linge de table" ; il
semble que l'origine flamande, et plus précisément Courtrai ne soit plus mise en doute,
remonterait au delà du XVe siècle, époque à laquelle on produisait déjà des
tissus de lin agrémentés de dessins simples obtenus lors du tissage.
Pourquoi les Flandres?
Parce que le damassé résulte de deux éléments principaux : la matière première
qui est le lin spécialité de la région et la technique du damas de soie que les
Italiens maitrisaient fort bien au XVe siècle. Or Bruges le plus
important port de l'Europe du nord était
flamand et entretenait des
rapports commerciaux privilégiés avec l'Italie. C'est ainsi que les artisans
flamands commencèrent par copier les motifs des damas de soie venus d'Italie,
en utilisant non pas la soie, mais le lin.
Les lins damassés historiés
étaient réalisés sur des métiers à la tire, le but étant une imitation du décor
floral inspiré des damas de soie italiens
Ce n'est qu'au XVI e
siècle, que les artisans flamands
s’étant familiarisés avec la technique, imaginèrent leur propre vocabulaire
ornemental. On note une évidente similitude entre les sources d'inspiration de
la tapisserie flamande et celles des damassés (chasses, scènes figuratives,
paysages..)
On note cependant une nette
inspiration orientale dans le vocabulaire ornemental des premiers damassés
(animaux affrontés, arbre de vie..) puis l'influence de la renaissance se fera
sentir, les sources se transformant au fil des ans : à la fin du XV et au début
du XVI e siècle apparait tout un arsenal de motifs végétaux
Entre le XVI e siècle et le
XVIIIe siècle la production de lin damassé historié fut très importante et les
étoffes qui nous sont parvenues
sont aujourd’hui des sources de documentation
importantes . En effet les dessins de ces étoffes sont censés commémorer des
évènements importants comme des victoires ou
des mariages royaux.
Les tapisseries tout comme
ces tissus étaient des commandes passées aux tisserands par les grands du
royaume (roi, princes ou encore évêques...) Dates, ou inscriptions sont de
précieux points de repères pour les historiens. C’est ainsi que grâce à des toiles damassées
historiées nous avons des « images » du mariage de Philippe V et de
Louise de Savoie.
Ces tissus de prix, souvent
des cadeaux de mariage ou reçus en héritage sont conservés précieusement au
sein des familles et transmis de générations en générations. Comme pour tous
les produits de luxe, seules les familles aisées possédaient de tels trésors.
Le linge de table était souvent offert en
cadeau, comme en témoigne celui offert par la municipalité de Reims à Charles
Quint lors de son passage dans la ville. Cadeau dont la valeur atteignait
environ 1 000 florins.
L'inventaire de Catherine
de Médicis mentionne trois tabliers damassés et trois douzaine de serviettes de
même
Le succès commercial du lin
damassé historié entraina un accroissement de la production. De nombreux champs
furent dévolues à l'étendage des étoffes. Les tissus de lin étaient exposés à
la lumière à l’air et à la rosée pour assurer leur blanchiment de la fibre.
C'est à Reims et à Caen au
XVIe siècle que débuta la fabrication des toiles damassée en France. Dès cette
époque, le linge de maison damassé sera alors nommé "grand Caen ».
Leur qualité était si belle que la production
locale rivalisa avec les productions étrangères de Venise et des Flandres. C'est André Graindorge, originaire de Caen
qui semble t il le premier imagina de décorer ces toiles avec des fleurs et
autres dessins géométriques obtenus par tissage. Son fils Richard Graindorge
poussa cet art jusqu'à orner ses toiles de scènes de personnages, animaux et
figures.
« ... et si je ne peux
me taire, qu'il n'y a pas de ville en Europe où il se fabrique plus beau et
singulier linge de table que l'on appelle haute lice sur lequel les artisans
telliers représentent toute sorte de fleurs, oiseaux arbres, médailles et
armoiries de roi, prince seigneurs, aussi proprement que le plus estimé peintre
pouvait le rapporter avec son pinceau.
Charles de Bourgeville in "Antiquités de Neustrie"
Michel, fils de Richard repris
l'affaire familiale et installa plusieurs manufactures de linge damassé produit
devenu au XVIIe d'un usage "courant".
La dynastie des Graindorge
donna à la production familiale le nom de haute lice, mais le mot damassé déjà
en usage au XVIe siècle, prévalait car cette sorte de toile imitait à la
perfection les étoffes dites damas blanc
Les hollandais, les
irlandais et les anglais s'emparèrent de cette industrie dans la seconde moitié
du XVIIe siècle. Les Huguenots français chassés de leur pays allèrent s'établir
dans des terres plus accueillantes et en particulier en Hollande en Angleterre,
en Irlande, en Allemagne et en Suisse
Ils apportaient avec eux
leur expérience dans la fabrication des lins damassés et du travail de la soie .
L'industrie hollandaise de
lin damassé historié très en pointe au
XVIIe siècle périclita au cours XVIIIe. Les causes de ce déclin furent
multiples : la concurrence étrangère (France, Irlande, Saxe), l'importance de
plus en plus marquée du coton
Ils furent nombreux à s’installer
à Spitafield ville située non loin de Londres qui devint un grand centre du
travail de la soie.
L'industrie
du lin damassé s'implata également en Irlande où elle fut encouragée par Louis Crommelin, un tisserand
huguenot, que la révocation de l'Edit de Nantes avait chassé de sa Picardie
natale en 1685.
Pour les mêmes raisons un
autre centre de linge damassé se hissa au premier rang : Shonnau en Saxe au
début du XVIIIe siècle
Courtrai était très proche de Bruges centre
du commerce international, et c'est là que s'établi le premier atelier/
magasin. Le lin y était tissé sur place.
Ces productions étrangères inondèrent
le marché français, les artisans locaux n’étant plus en mesure de fabriquer de
telles merveilles. Lorsque madame de
Maintenon voulu créer une manufacture de linge ouvré en 1682, elle fut dans
l'obligation de faire venir des Flandres 25 ouvriers.
La qualité des productions
françaises repris alors des forces, rivalisant avec les production flamandes et
hollandaise ce qui permis à des villes comme Saint Quentin, Bapaume, Douai ou
Valenciennes de se développer économiquement. Les mulquiniers se firent de plus
en plus nombreux et se regroupèrent en corporation dont les armoiries
représentaient une figure d'évêque mitré portant une étole et tenant un suaire
dans ses mains, au dessus une éponge et des oiseaux.
La symbolique est perceptible dans ces armoiries puisque la sainte patronne des mulquiniers était sainte Véronique qui avait essuyer le visage du Christ avec un linge fin, analogue à la baptiste que fabriquait ces ouvriers
La symbolique est perceptible dans ces armoiries puisque la sainte patronne des mulquiniers était sainte Véronique qui avait essuyer le visage du Christ avec un linge fin, analogue à la baptiste que fabriquait ces ouvriers
On nomme aussi
"damassé" la toile à matelas fabriquée avec des fils de lin et dont
les dessins sont faits avec des fils de coton.
Dans un premier temps le
commerce de ces tissus ne s'exerça que dans des boutiques situes dans les zones
urbaines. Il y eut coexistence entre plusieurs sortes de lins : les lins damassés
et les lins simples (toile) et les toiles de chanvre ces derniers étaient
surtout une industrie provinciale, dont la production était essentiellement
destinée aux vêtements et au sous vêtements populaires`
DESCRIPTION
Damassé est le terme
générique qui désigne les tissus utilisés pour le linge de table et dont les
dessins sont le résultat d'une juxtaposition des effets de chaîne et des effets
de trame.
Les tissus damassés se
caractérisent par plusieurs détails
-les effets monochromes
mats du fond et brillants des dessins. Les motifs peuvent être rendus plus
brillants par calandrage.
Les dessins qui
apparaissent sont obtenus par des armures de sergé ou de satin effets de chaîne
qui travaillent en opposition avec des armures de sergé ou de satin effets de
trame, de même rapport, en formant le fond qui est ainsi plus mat. Les effets
d'armure sont donc incorporés au décor. C'est une imitation en lin ou coton des
damas de soie.
- ils peuvent être utilisés sur les deux faces,
les dessins étant simplement inversés.
- l’invention du métier
Jacquard à permis de réaliser de grands motifs.
- autrefois la plupart des
damassés étaient blancs, car utilisés en linge de table ils devaient pouvoir bouillir
sans déteindre
Le linge de table
"damassé" comprend trois catégories d'articles :
-le linge ouvré ou à
dessins simples c’est à dire avec tous les dessins classiques ,
géométriques ou à croisure droite comme les damiers..
-le linge damassé qui
comporte des dessins représentant des fleurs, des fruits, des personnages, des
motifs décoratifs aux lignes courbes, des monogrammes, Ce second type exige une
fabrication plus complexe, qui débute avec l'exécution du dessin que l'on
désire reproduire, puis un second dessin spécial sur papier quadrillé ou la
mise en carte. Cette carte sera plus ou moins compliquée puisqu'il faut imiter
la nature sans avoir recours aux couleurs, avec de simples gradations dans les
tons puisque tous les fils de chaîne et de trame du tissu damassé sont de la
même couleur. La fabrication de ces damassés nécessite l'usage de la mécanique
jacquard
Autrefois le linge damassé
se fabriquait en fil de lin pur, mais pour diminuer son prix, de nombreux
fabricants ont présenté sur le marché des articles mi fils (coton/lin) ou
entièrement en fil de coton. Les plus beaux lins damassés subissaient un
traitement spécial : afin que les dessins puissent être lisibles les
motifs devaient être rendus brillants et lisses par un apprêt final
-le linge de table dit de
fantaisie : ce linge est fabriqué dans
des toiles de lin, de coton ou de fibres synthétiques. Les motifs sont alors
non plus tissés mais brodés à la machines (plumetis, jours, broderie anglaise)
UTILISATIONS
Pour l'habillement féminin
et la décoration. L’utilisation dépend évidemment de la composition : en
coton pour des chemises ou des robes légères, superbes châles s'il est en
étamine de laine, en coton et lin pour le linge de table. Les nappes damassées
en pur fil sont des produits merveilleux, mais devenus rares.