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mardi 8 février 2022

MARIANO FORTUNY - WILLIAM MORRIS : CONVERGENCES ET DIVERGENCES


A une génération d’écart, ce qui opposait ces deux "stars" du monde des arts décoratifs  importait moins que ce qui les réunissait. Ils avaient en commun le génie, la créativité, la culture, la curiosité, le talent, et des convictions fortes . 

Les origines 

Fortuny aristocrate espagnol, Morris, membre de la bourgeoisie britannique

Les sources d’intérêts

Fortuny est séduit par la culture du sud, fasciné par les artefacts crétois retrouvés lors de fouilles archéologiques de Knossos. Morris se passionnait pour les mythes nordiques, éperdument amoureux de l’art et de la littérature moyenâgeuse.

Une Equipe

Fortuny travaille, cherche, trouve avec sa femme qui  partage la même passion pour les couleurs, les matières, les objets et l’artisanat. Morris rejoint un groupe d’artistes peintres et poètes comme Rossetti, Millais, Hunt, Burne-Jones Ruskin fondateurs d’une « confraternité préraphaélite », à la manière des guildes.

Leur home-showroom

Fortuny  fit du Palazzo Pesaro Orfei à Venise sa résidence  et  son atelier-boutique. 

Morris fit de «Red House »  une résidence familiale réalisant lui même une grand partie de la décoration :  meubles, papier peint, tentures murales, tapis. 

A Kelmscott Manor, Morris  pu tout à loisir revivre les jolis moment de son enfance , de ce jardin un abécédaire où les entrelacs végétaux s’épanouissaient en toute liberté sur les papiers peints de la firme Morris and Co, liant à jamais les arts et la nature.

Ces lieux furent probablement choisis pour leur forte personnalité et ces deux hommes surent les façonner à l’image de leur idéal pour en faire un show-room personnalisé  dédié à un petit groupe d’amis et de clients très avertis. 

Leur but : créer des petites séries des produits utilitaires du quotidien à la fois beaux, fonctionnels et accessibles  financièrement à tous 

leurs convictions : la réussite de ce défi ne peut être envisagée sans l'appui des artisans détenteurs d'un savoir-faire inégalable.. 

Une conception similaire de l’art et la décoration

Tous deux orientent leur recherches vers un art global, donnant autant d’importance au papier peint, au mobilier, aux étoffes, faisant fi de la hiérarchie, chaque produit trouvant une place au sein d’une entité : la décoration d’intérieur est conçue par  chef d’orchestre qui est à la fois architecte, décorateur, textile designer, ébéniste, éclairagiste… Les arts décoratifs sont un et indivisibles.  

Le dilemme : l’opposition entre une production à l’unité ou en série très limitée de qualité mais onéreuse et une production industrielle de masse bon marché

Un bémol dans le business plan

Ni l’un ni l’autre ne parvinrent à finaliser le but de leur vie pourtant en théorie si « aimable ». Un obstacle insurmontable fit basculer leur souhait de rendre accessible  aux classes sociales défavorisées les objets du quotidien à la fois esthétiques et fonctionnels fabriqués en petite série par des artisans qualifiés et en utilisant des matériaux de qualité. La réalité fut difficile à surmonter, le prix des matières premières et le salaire des artisans spécialisés ne permettaient pas de rivaliser commercialement avec l’attractivité du prix des articles fabriqués industriellement. Ils voulaient s’adresser à une population ouvrière mais ils séduisirent l’un et l’autre une clientèle, réduite certes mais assidue, issue de la noblesse et de la haute bourgeoisie, cultivée, fidèle et surtout, capable d’acquérir financièrement ces merveilles.

Alea jacta est

L’histoire passera outre cette défaite pécuniaire, ne retenant que  leurs inventions,  leurs techniques innovantes, leur passion pour le travail manuel et leur détestation pour les objets industriels produits en série, ainsi furent ils chacun à sa façon, les initiateurs du renouveau des arts décoratifs. 

Un rapport homme/machine  emprunt d'humanité

Si leurs créations perdurent, si le monde artistique du XXIe siècle leur consacre toujours des expositions, c’est parce que leur message est universel : le genre humain peut se passer de la machine pour créer, la machine ne peut pas se passer du génie humain pour exister.  

Je t'aime moi non plus

Le duo homme/machine est désormais inséparable mais   sa réussite ne tient à qu'à un fil :  un partage judicieux des tâches, c'est à dire laissant à la machine  tout ce que l'homme n'est pas en capacité de réaliser. C'est ainsi que Fortuny et plus tard Morris  mirent en pratique ce postulat  :  produire des articles de qualité de manière à satisfaire l’égo du  créateurs et le plaisir du client.


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