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vendredi 16 août 2019

L'HISTOIRE DES DAMASSES HISTORIES


Le damassé c’est une technique de tissage qui somme toute est assez connue, mais peut être trop car si l’on veut vraiment aller à sa rencontre quelques notions de base s’avèrent nécessaires.
La fabrication de ce tissu fut longtemps réservée à un genre d'article dit "linge de table" ; il semble que l'origine flamande, et plus précisément  Courtrai ne soit plus mise en doute, remonterait au delà du XVe siècle, époque à laquelle on produisait déjà des tissus de lin agrémentés de dessins simples obtenus lors du tissage.
Pourquoi les Flandres? Parce que le damassé résulte de deux éléments principaux : la matière première qui est le lin spécialité de la région et la technique du damas de soie que les Italiens maitrisaient  fort  bien au XVe siècle. Or Bruges le plus important port de l'Europe du nord était  flamand et  entretenait des rapports commerciaux privilégiés avec l'Italie. C'est ainsi que les artisans flamands commencèrent par copier les motifs des damas de soie venus d'Italie, en utilisant non pas la soie, mais le lin.
Les lins damassés historiés étaient réalisés sur des métiers à la tire, le but étant une imitation du décor floral inspiré des damas de soie italiens
Ce n'est qu'au XVI e siècle, que  les artisans flamands s’étant familiarisés avec la technique, imaginèrent leur propre vocabulaire ornemental. On note une évidente similitude entre les sources d'inspiration de la tapisserie flamande et celles des damassés (chasses, scènes figuratives, paysages..)
On note cependant une nette inspiration orientale dans le vocabulaire ornemental des premiers damassés (animaux affrontés, arbre de vie..) puis l'influence de la renaissance se fera sentir, les sources se transformant au fil des ans : à la fin du XV et au début du XVI e siècle apparait tout un arsenal de motifs végétaux

Entre le XVI e siècle et le XVIIIe siècle la production de lin damassé historié fut très importante et les étoffes qui nous sont parvenues
 sont aujourd’hui des sources de documentation importantes . En effet les dessins de ces étoffes sont censés commémorer des évènements importants comme des victoires ou   des mariages royaux.
Les tapisseries tout comme ces tissus étaient des commandes passées aux tisserands par les grands du royaume (roi, princes ou encore évêques...) Dates, ou inscriptions sont de précieux points de repères pour les historiens.  C’est ainsi que grâce à des toiles damassées historiées nous avons des « images » du mariage de Philippe V et de Louise de Savoie.
Ces tissus de prix, souvent des cadeaux de mariage ou reçus en héritage sont conservés précieusement au sein des familles et transmis de générations en générations. Comme pour tous les produits de luxe, seules les familles aisées possédaient de tels trésors.
 Le linge de table était souvent offert en cadeau, comme en témoigne celui offert par la municipalité de Reims à Charles Quint lors de son passage dans la ville. Cadeau dont la valeur atteignait environ 1 000 florins.
L'inventaire de Catherine de Médicis mentionne trois tabliers damassés et trois douzaine de serviettes de même

Le succès commercial du lin damassé historié entraina un accroissement de la production. De nombreux champs furent dévolues à l'étendage des étoffes. Les tissus de lin étaient exposés à la lumière à l’air et à la rosée pour assurer leur blanchiment de la fibre.
C'est à Reims et à Caen au XVIe siècle que débuta la fabrication des toiles damassée en France. Dès cette époque, le linge de maison damassé sera alors nommé "grand Caen ».
 Leur qualité était si belle que la production locale rivalisa avec les productions étrangères de Venise et des Flandres.  C'est André Graindorge, originaire de Caen qui semble t il le premier imagina de décorer ces toiles avec des fleurs et autres dessins géométriques obtenus par tissage. Son fils Richard Graindorge poussa cet art jusqu'à orner ses toiles de scènes de personnages, animaux et figures.
« ... et si je ne peux me taire, qu'il n'y a pas de ville en Europe où il se fabrique plus beau et singulier linge de table que l'on appelle haute lice sur lequel les artisans telliers représentent toute sorte de fleurs, oiseaux arbres, médailles et armoiries de roi, prince seigneurs, aussi proprement que le plus estimé peintre pouvait le rapporter avec son pinceau.
Charles de Bourgeville  in "Antiquités de Neustrie"

Michel, fils de Richard repris l'affaire familiale et installa plusieurs manufactures de linge damassé produit devenu au XVIIe d'un usage "courant".
La dynastie des Graindorge donna à la production familiale le nom de haute lice, mais le mot damassé déjà en usage au XVIe siècle, prévalait car cette sorte de toile imitait à la perfection les étoffes dites damas blanc
Les hollandais, les irlandais et les anglais s'emparèrent de cette industrie dans la seconde moitié du XVIIe siècle. Les Huguenots français chassés de leur pays allèrent s'établir dans des terres plus accueillantes et en particulier en Hollande en Angleterre, en Irlande, en Allemagne et en Suisse
Ils apportaient avec eux leur expérience dans la fabrication des lins damassés et du travail de la soie .
L'industrie hollandaise de lin damassé  historié très en pointe au XVIIe siècle périclita au cours XVIIIe. Les causes de ce déclin furent multiples : la concurrence étrangère (France, Irlande, Saxe), l'importance de plus en plus marquée du coton
Ils furent nombreux à s’installer à Spitafield ville située non loin de Londres qui devint un grand centre du travail de la soie.
 L'industrie  du lin damassé s'implata également en Irlande où elle fut  encouragée par Louis Crommelin, un tisserand huguenot, que la révocation de l'Edit de Nantes avait chassé de sa Picardie natale en 1685.
Pour les mêmes raisons un autre centre de linge damassé se hissa au premier rang : Shonnau en Saxe au début du XVIIIe siècle
  Courtrai était très proche de Bruges centre du commerce international, et c'est là que s'établi le premier atelier/ magasin. Le lin y était tissé sur place.

Ces productions étrangères inondèrent le marché français, les artisans locaux n’étant plus en mesure de fabriquer de telles merveilles.  Lorsque madame de Maintenon voulu créer une manufacture de linge ouvré en 1682, elle fut dans l'obligation de faire venir des Flandres 25 ouvriers.
La qualité des productions françaises repris alors des forces, rivalisant avec les production flamandes et hollandaise ce qui permis à des villes comme Saint Quentin, Bapaume, Douai ou Valenciennes de se développer économiquement. Les mulquiniers se firent de plus en plus nombreux et se regroupèrent en corporation dont les armoiries représentaient une figure d'évêque mitré portant une étole et tenant un suaire dans ses mains, au dessus une éponge et des oiseaux.
La symbolique est perceptible dans ces armoiries  puisque la sainte patronne des mulquiniers était sainte Véronique qui avait essuyer le visage du Christ avec un linge fin, analogue à la baptiste que fabriquait ces ouvriers
On nomme aussi "damassé" la toile à matelas fabriquée avec des fils de lin et dont les dessins sont faits avec des fils de coton.
Dans un premier temps le commerce de ces tissus ne s'exerça que dans des boutiques situes dans les zones urbaines. Il y eut coexistence entre plusieurs sortes de lins : les lins damassés et les lins simples (toile) et les toiles de chanvre ces derniers étaient surtout une industrie provinciale, dont la production était essentiellement destinée aux vêtements et au sous vêtements populaires`


DESCRIPTION 
Damassé est le terme générique qui désigne les tissus utilisés pour le linge de table et dont les dessins sont le résultat d'une juxtaposition des effets de chaîne et des effets de trame.
Les tissus damassés se caractérisent par plusieurs détails
-les effets monochromes mats du fond et brillants des dessins. Les motifs peuvent être rendus plus brillants par calandrage.
Les dessins qui apparaissent sont obtenus par des armures de sergé ou de satin effets de chaîne qui travaillent en opposition avec des armures de sergé ou de satin effets de trame, de même rapport, en formant le fond qui est ainsi plus mat. Les effets d'armure sont donc incorporés au décor. C'est une imitation en lin ou coton des damas de soie.
-  ils peuvent être utilisés sur les deux faces, les dessins étant simplement inversés.
- l’invention du métier Jacquard à permis de réaliser de grands motifs.
- autrefois la plupart des damassés étaient blancs, car utilisés en linge de table ils devaient pouvoir bouillir sans déteindre
Le linge de table "damassé" comprend trois catégories d'articles :
-le linge ouvré ou à dessins simples c’est à dire avec tous les dessins classiques , géométriques  ou à  croisure droite comme les damiers..
-le linge damassé qui comporte des dessins représentant des fleurs, des fruits, des personnages, des motifs décoratifs aux lignes courbes, des monogrammes, Ce second type exige une fabrication plus complexe, qui débute avec l'exécution du dessin que l'on désire reproduire, puis un second dessin spécial sur papier quadrillé ou la mise en carte. Cette carte sera plus ou moins compliquée puisqu'il faut imiter la nature sans avoir recours aux couleurs, avec de simples gradations dans les tons puisque tous les fils de chaîne et de trame du tissu damassé sont de la même couleur. La fabrication de ces damassés nécessite l'usage de la mécanique jacquard
Autrefois le linge damassé se fabriquait en fil de lin pur, mais pour diminuer son prix, de nombreux fabricants ont présenté sur le marché des articles mi fils (coton/lin) ou entièrement en fil de coton. Les plus beaux lins damassés subissaient un traitement spécial : afin que les dessins puissent être lisibles les motifs devaient être rendus brillants et lisses par un apprêt final
-le linge de table dit de fantaisie   : ce linge est fabriqué dans des toiles de lin, de coton ou de fibres synthétiques. Les motifs sont alors non plus tissés mais brodés à la machines (plumetis, jours, broderie anglaise)

UTILISATIONS 
Pour l'habillement féminin et la décoration. L’utilisation dépend évidemment de la composition :   en coton pour des chemises ou des robes légères, superbes châles s'il est en étamine de laine, en coton et lin pour le linge de table. Les nappes damassées en pur fil sont des produits merveilleux, mais devenus rares.



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