lundi 18 avril 2011

Voyage au pays des ikats N°2


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 je vous invite  dans ce second volet dédié à l'impression artisanal en Ouzbekistan  à découvrir quelques secrets de fabrication des ikats  
Le mot ikat est une traduction d'un mot indonésien mengikat qui a plusieurs significations : lien, attacher, envelopper.

L'impression par réserve se retrouve dans de nombreux pays, mais l'impression par réserve sur les fils est moins fréquente. Je vous parlerai dans une autre fois des différents types d'impression par réserve utilisés en Indes, en Indonésie, au Japon et en Occident.


Le support peut être en coton ou en soie, en soie et coton ou, et oui sacrilège, en polyester  et imprimé. Les chinois se sont emparés de ce marché avec une facilité déconcertante. Les petites échoppes regorgent de tissus imprimés imitant les ikats, en fibres synthétique. Ils sont certes moins onéreux et plus facile d'entretien que les véritables ikats mais pourquoi pas si le choix est possible. Voilà le problème posé. Bientot, étant donné les prix élevés des  ikats traditionnels, il n'y aura plus de clients pour ce type de production, les artisans n'auront plus de commandes, la transmission de leur savoir , plus de teinturiers, plus de tisserands, les ikats deviendront des pièces de musée.
Atlas, Adrass, Abr, Shahi, sont en voie de disparition. Alors  pendant que vous pouvez encore voir et acheter des ikats en Ouzbekistan, profitez en.





La technique de l'impression des ikats consiste donc à teindre les fils avant le tissage. Cette opération est délicate, elle réclame de la précision et de la patience. Autrefois les différentes phases de fabrication étaient réalisées dans des ateliers indépendants les uns des autres. Des familles se spécialisaient les unes dans la teinture à froid, les autres dans la teinture à chaud, ou encore dans le filage de la soie, ou dans l'apprêt au blanc d'oeuf... Aujourd'hui les ateliers sont  généralement regroupés. bien que le travail artisanal s'effectue encore en famille.
Parmi les différentes opérations que nécessite la fabrication de ce type de tissu, la plus importante et la plus délicate est sans conteste la teinture.
Les fils de chaîne une fois tendus sur le métier vont servir de  support aux motifs. Le maître teinturier va indiquer les dessins  par des repères sur fils. Il utilise pour cela  un morceau de charbon de bois. Ce sont des points ou des traits qui disparaîtront avec l'eau des bains de teinture.

La chaine est divisé en plusieurs groupes de fils  afin qu'ils puissent être teints séparément
Les  portions de fils de chaine qui  ne doivent être en contact avec le colorant sont ligaturées à l'aide d'un gros fil de coton  qui peut être  parfois enduit de graisse. Les parties protégées ne seront pas teintes et c'est pourquoi cette technique se nomme teinture par réserve.


Le travail n'est pas pour autant terminé puisque chaque couleur supplémentaire nécessite un montage de la chaîne,une ligature nouvelle et  un démontage de la chaîne , un nouveau bain de teinture Ainsi de suite jusqu'à la définition complete du dessin. Il y a autant de bain de teinture que de couleurs.


.  Ce voile arachnéen, ce fantôme d'étoffe est en construction, ce n'est pour le moment qu'une frêle esquisse de ce qui deviendra un superbe ikat.
En Ouzbekistan  la teinture se fait sur les fils de chaine essentiellement, très rarement sur les fils de chaîne et de trame. Ici on peut observer la naissance du motif, les opérations de teintures sont terminées, le motif apparaît dans sa totalité, tout est prêt pour que le tissage commence. Le fil de trame passé le tissu sera achevé.


 L'emplacement des liens est visible une fois le travail terminé,  la fin de chaque série de motifs est marqué par une ligne blanche sur toute la largeur du tissu
 Entre deux motif on remarque un espace blanc  




Pour une même méthode de teinture on obtient des tissus d'aspect différents. Les noms donnés aux ikats sont fonction  de la grosseur de fils  utilisés, de l'armure choisie, de l'apprêt final.
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Les ikats ouzbeks sont très colorés et les motifs les plus courants sont  géométriques, la spécificité des ikats réside dans le contour flou  en chaine des dessins, causé par le  léger décalage des fils teints
satin de soie détail

un ikats  tout soie armure satin   Atlas c'est le plus commun
C'est le tissu utilisé pour le costume national Ouzbek
 c'est aussi ce motif que les industriels chinois ont choisis pour  leurs ikats imprimés en polyester
Le motif est très visible sur l'endroit, mais à l'envers il est à peine perceptible
un ikat  chaîne en soie et  trame en coton Adrass




 abr ou shahi c'est un ikat tout soie armure taffetas . La finesse du tissage, le bruissement de l'étoffe, et ses motifs géométriques si caractéristiques ont de quoi séduire les plus blasées d'entre nous. Pour apprécier ces tissus, et les différencier il faut les toucher, les caresser, les froisser, les sentir, et puis aussi les utiliser

 C'est une photo d'un ikat en cours  de fabrication. C'est presque un tableau abstrait.
et dans ce flou artistique je me sens comme un poisson dans l'eau, j'aime m'évader dans cet univers coloré  


J'aime regarder chaque jour ces tissus qui attendent sagement, bien rangés, pliés sur les étagères de la boutique. Mon attention est toujours attirée par une ligne, une couleur, un motif que je n'avais pas vu la veille. Selon l'éclairage, mon humeur, ou la météo, je les redécouvre, ils m 'emportent dans des reveries, ce sont mes amis du matin.  Leur histoire c'est aussi celle d'un peuple aux origines multiples qui a réussi à unir  ses forces créatives, un savoir faire ancestral pour donner naissance à ce tissu devenu l'emblème du pays. 



 Trop de choix? Non c'est fantastique d'avoir envie de tout acheter! 


 Il faut choisir  et c'est très frustrant. Mais c'est parce que je les
sélectionne en prenant mon temps que je ne regrette pas mes achats.

Ces moments passé avec les artisans évoquent des souvenirs, de jolies rencontres, et des  échanges passionants. 


 Le tissage se fait sur un métier à tisser et à la main. La largeur des tissus est variable, dans l'ensemble on trouve des ikats en petite et moyenne largeur , entre 0,40 m et 0, 80 m
La véritable tisserande c'est elle. Le tissu est terminé
Le tissu est terminé. Mais qui donc se cache derrier le métier à tisser ? L'inspecteur des travaux finis  c'est bien moi! 
 Après le filage, la teinture et le tissage il reste une opération avant la mise la présentation au client : l'appret ou encore ennoblissement.Si les satins sont brillants naturellement, les taffetas ont besoin d'un petit coup de pouce, et pour cela les artisans appliquent du blanc d'oeuf sur la surface  afin d'obtenir un aspect glacé,> ou bien écrasent la surface du tissu avec un maillet de bois. L'utilisation du maillet écrase les côtes du tissu et donne une surface moirée. Autrefois les cotons étaient rendus presque aussi luisants que les soies par un polissage de leur surface à l'aide d'une demi sphère en verre.


Une fois toutes les opérations terminée, le tissu est proposée à la vente. Jadis on utilisait les Ikats pour la confection des manteaux d'apparat, mais aujourd'hui ils ont trouvé une place de choix dans la décoration de nos intérieurs, et rien de vous empeche de faire une veste avec ces ikats.
ces ikats sont en 0,60m de large





Ce coussin fait partie du décor de  la boutique De Gilles








cette veste  achetée à Boukara est constituée de plusiers lés de 0,40 m de large.  C'est un satin de soie matelassé, doublé d'une toile de coton bleue. Les raccords se fondent dans les motifs, qui sont placés symétriquement aussi bien sur le  devant que dans le dos

 
un petit dernier avant de nous séparer : détail d'un Abr. Le relief des côtes est obtenu par l'utilisation d'un fil de trame  en coton plus gros que les fils de chaîne en soie. C'est un peu le principe du tissage des ottomans.




On obtient un effet ondé ou moiré en écrasant le relief des côtes par endroit

Voilà cette histoire se termine, j'ai été très heureuse de partager avec vous cette découverte et mes souvenirs de voyage. Sachez que la plupart des photos de tissus ont été prises dans la boutique De Gilles tissus et que vous pouvez venir les admirer ou même les acheter. Merci pour l'interêt que vous portez à ce sujet et à ce blog. Catherine..

7 commentaires:

  1. Oh lala, je l'attendais cet article Number 2 sur les "ikats" d'Ouzbekistan ! Merci de m'avoir fait découvrir la belle histoire de la naissance d'Atlas, Adrass, Adr et Shahi, ces princes et princesses des mille et une nuits ouzbèkes. Une visite de courtoisie s'impose pour les années à venir.

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  2. je viens de découvrir votre blog
    merci pour ces reportages

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  3. Moi qui adore les ikats j'ai appris plein de choses. il faut absolument que je vienne vous voir.

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  4. je rentre d'ouzbekistan;quel plaisir de lire toutes ces explications et les photosqui me rappellent ce si beau voyage!clo

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  5. Quel plaisir de vous lire !
    Merci

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  6. moi aussi je reviens d'Ouzbekistan où j'ai vu beaucoup d'ikats dont certains magnifiquement travaillés dans un défilé de mode qui va se répéter tout l'été à Boukhara.
    Merci pour les détails de fabrication.

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  7. Je partage avec vous cet intérêt pour les ikats. Je suis allé en Ouzbékistan il y a 20 ans et j'ai relaté cette expérience dans l'article suivant : https://oliviermasson.art/fr/articles/13-ikat-ouzbek.html

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